Tamil Nadu, suite et fin

Un nouvel épisode de notre saga indienne, au cours de laquelle les sujets d’étonnement ne manquent pas.

Ceux de nos lecteurs qui trouvent qu’on écrit trop (il y en a, si, si !), vont être servis : Ca ne va pas en s’arrangeant, plus ça va et plus on a envie de raconter. Alors installez-vous confortablement dans un bon fauteuil, prenez de quoi boire un coup à notre santé (il fait si chaud ici), et bonne lecture !

En quittant l’école, encore très émus, nous partons avec Raja et un chauffeur à la découverte des environs. Ils sont heureux de nous faire découvrir quatre temples que n’aurions certainement pas trouvés tout seuls puis un musée situé en bord de mer, où on se crame la plante des pieds car on n’a pas l’habitude de marcher pieds nus sur des sols gavés de chaleur par un soleil blanc.

Lequel soleil est utilisé à proximité pour faire sécher des poissons qui sont vendus près du rivage, l’odeur nous chatouille les narines depuis un moment déjà, elle est tenace mais la conservation doit être bonne. Pas de dégustation, merci. Les femmes qui travaillent là sont en plein soleil, elles vident et étêtent certains petits poissons pour les mettre à sécher ensuite sur des bâches, certaines retiennent notre regard.

Moment embrassant lorsqu’arrive le moment de se quitter, le chauffeur demande une somme démesurée, on ne s’attendait pas à ça ; d’accord pour payer l’essence, mais à aucun moment il n’avait été évoqué une prestation coûteuse sinon on aurait décliné, préférant donner l’argent à l’école. Finalement ça s’arrangera, ça confirme qu’en Inde il faut toujours bien faire préciser les choses avant de s’embarquer dans quoi que ce soit.

Kumbakonam

Un bus bringuebalant (enfin, très usé mais qui roule encore bien) nous conduit à Kumbakonam, où nous arrivons à la nuit tombée après avoir longé moult rizières, bananeraies, champs de canne à sucre et autres cultures dont nous ignorons tout, si ce n’est que ce sont des trucs qui ne poussent pas en Bretagne. Lorsque nous bivouaquions, il fallait arriver avant la nuit, mais là ce n’est pas gênant, on trouve toujours à se loger près de la gare routière ou en tout cas pas très loin. Pas toujours du premier coup, dans le cas présent on fuit le premier hôtel visité aussi vite que ses cafards qui galopent dans les chambres, pour trouver un très bel établissement au prix fort raisonnable ; on n’aura jamais eu une chambre si moderne et bien équipée, on se serait presque crus dans un Novotel. En plus la dame en sari à l’accueil est fort sympathique et très souriante, elle va même jusqu’à soulever le sac de Joël et pousse des petits cris… (c’est lourd pour ces deux pauvres blancs ) !

On pensait ne rester qu’une nuit, mais c’est si confortable là dedans qu’on se lève trop tard pour aller visiter les temples, qui sont fermés à l’heure de la sieste, alors on restera une nuit de plus. Peu importe, on a tout le temps, n’est ce pas ?

Vous devez vous dire qu’on va faire une indigestion de temples, on le redoutait aussi, mais non : D’une part ils sont très différents les uns des autres, d’autre part c’est toujours aussi intéressant d’observer les rites et d’apprécier l’atmosphère de ces lieux. Ils ont des noms à coucher dehors, qu’on a bien du mal à retenir, mais on les trouve aisément et quand c’est trop loin on prend un auto-rickshaw qui fait « tuc, tuc, tuc, tuc, tuc » en roulant (d’où leur autre nom). Il arrive même que, ayant visité les lieux le soir, on y revienne le lendemain matin pour bénéficier d’une autre lumière.

Donc, visite du temple de Nagesewara, le plus ancien de la ville, celui d’Airavatesvara, tout en pierres sculptées et non peintes, entouré d’un écrin de verdure particulièrement paisible, et finalement le temple de Kumbeshwara, le plus vaste consacré à Shiva.

Thanjavur, quelle température !

On savait que le Tamil Nadu est chaud, ça se confirme. Pour une fois on prend l’option clim à l’hôtel, mais il faudra la régler sur 29° pour qu’elle ne nous envoie pas un air trop glacé, surtout que les indiens ont généralement la bonne idée de mettre la clim dirigée vers le lit : pour un peu, il faudrait mettre un pyjama pour ne pas avoir froid, un comble.
Le début d’après midi est d’ailleurs si chaud que, dans les ruelles, nombre d’échoppes sont fermées, ce n’est que le soir que ça s’anime vraiment. On ne rencontre pour ainsi dire que des vaches et des marchands de fruits. On achète même des bananes et des oignons en beignets sur le trottoir, une cuisine improvisée mais comme il y a la queue on n’hésite pas on prend notre tour et on se régale.

Notre visite du palais royal se trouve vite abrégée au profit d’une sieste urgente pour cause de suffocation…quand on y revient après 16 h la lumière est plus belle et la galerie d’art ne demande qu’à nous faire admirer ses magnifiques statues des X et XI siècle. Nous remarquons toutefois qu’au fil des temps la représentation des dieux (car c’est évidemment le sujet unique) ne varie guère, il n’y a pas de courant artistique propre à une époque, à nos yeux profanes ce qui se fait aujourd’hui semble identique à ce qui se faisait un millénaire auparavant. Mais dans tous les cas c’est d’une finesse remarquable, même que nous aimerions bien avoir une de ses jolies statues pour égayer  notre séjour par exemple.

Maintenant, direction le temple de Brihadistwara, merveille classée Unesco.

Si vous vous demandez comment on s’y retrouve dans ces villes inconnues, sachez que notre profil de cyclotouristes a déteint sur notre profil de piétons : On utilise le GPS, tout simplement (en fait une appli GPS sur le smartphone). C’est très commode car on n’a pas besoin de se mettre en quête d’un plan de la ville, ça permet de retrouver l’hôtel le soir, et même dans le bus on l’utilise pour savoir où descendre car il n’y a pas vraiment d’afficheur pour indiquer les arrêts (auquel on ne comprendrait rien, de toute façon).

Ce temple chola consacré à Shiva, qui date de l’an 1003, a été bâti par un type qu’on ne connaît pas mais qui était tout de même roi des rois, Rajaraja. Il devait être bon car il a fait graver sur les pierres les noms et adresses de ses danseurs, musiciens, poètes et barbiers. Une sorte de Pages Jaunes avant l’heure, mais les infos doivent être un peu obsolètes. Le temple est très fréquenté par les familles et les scolaires. Nous sommes toujours aussi souvent l’attraction auprès des enfants qui viennent nous serrer la main et des jeunes gens qui veulent nous photographier.

Le Rock Fort, pas de quoi en faire tout un fromage

C’est à Trichy que ce trouve ce Rock Fort, perché sur un promontoire rocheux au milieu d’une ville par ailleurs plate comme Agathe (pourvu que nous n’ayons pas d’Agathe parmi nos lecteurs…). Cet endroit sensé être exceptionnel ne nous aura pas paru plus fabuleux que ça.

Outre le fait qu’il faille grimper près de quatre cent marches pour en atteindre le sommet, l’accès à la dernière partie nous a valu une franche explication avec le cerbère gardant les lieux ; alors que nous avions déjà payé notre droit d’entrée en bas, le type exige que nous lui laissions nos appareils photos ou qu’on paye encore pour eux. Certes ce n’était pas cher, mais on n’était pas d’accord car on n’avait pas l’intention de prendre de photos, on voulait les garder dans le sac. Il ne veut rien savoir, veut fouiller nos sacs, et alors que jusqu’ici il laissait passer tout le monde sans problème, il se met à faire du zèle et à ouvrir les sacs de tous ceux qui lui passent devant, pour nous montrer que ce n’est pas après nous qu’il en a. Bon, finalement on paye pour un appareil et basta ! Du coup, on passe et il arrête de contrôler les autres, cet animal.

De là haut, la vue sur la ville de Trichy qui serait belle si la ville en question était remarquable, mais ce n’est qu’un entremêlement de constructions à perte de vue, heureusement qu’il y a un coucher de soleil, ça aide. Et de là on voit bien Notre Dame de Lourdes, la vaste et belle église qu’on a visitée en venant, presque comme une église de chez nous sauf qu’il n’y a pas de bancs et qu’on laisse ses chaussures à l’entrée, vu qu’ici tout le monde s’assied par terre.

Le lendemain, par contre, on est bluffés par le temple de Sri Rangawathaswamy (quand on vous dit qu’ils ont des noms à coucher dehors…). C’est une véritable forteresse, on doit franchir sept portes avec à chaque fois des murs d’enceinte, des ruelles, des échoppes, toute une activité bourdonnante, une ruche en pleine activité. Et quand on parle de portes, il ne faut pas imaginer des portes de placard Ikea, ni même des portes d’entrée Lapeyre, non ce sont des gopurams, ces grandes (voire même immenses) constructions de plusieurs étages entièrement recouvertes de statues, généralement peintes. Hélas, ici les gopurams sont en réfection, et recouverts de grandes bâches, ils auraient pu activer les travaux en prévision de notre visite, tout de même !

Un petit gopuram

Et des travaux,il y en a partout dans ce temple, mais il faut reconnaitre qu’il y a de quoi faire tellement c’est étendu. Il y a quarante neuf sanctuaires, tous dédiés à Vishnu sous ses différentes formes, d’ailleurs le temple est consacré à Ranganatha, une forme couchée de Vishnu (tout ceci est un peu compliqué pour nous, déjà qu’il y a une foultitude de dieux, mais en plus ils peuvent avoir moult représentations, voire même changer de sexe, avoir plein de bras ou seulement deux, un visage humain ou animal, quel bazar !).

Ca s’active dans tous les coins, les tailleurs de pierre, les porteurs (et porteuses) de briques, de bois sur la tête, même quelques engins de chantier et camions, au milieu de tout ce capharnaüm passe un éléphant allant on ne sait où, les pèlerins imperturbables vaquent à leur culte, ça ressemble à une fourmilière dans laquelle chacun fait ce qu’il a à faire sans s’étonner de ce qui se passe autour. Certains endroits ne sont pas accessibles aux non hindous, mais ce n’est pas grave, on a déjà largement de quoi s’en mettre plein les yeux.

Ce temple contient 958 piliers en granit, on le surnomme aussi le temple aux 1000 piliers (même s’il lui en manque quelques uns). Nous sommes effarés de la finesse et de la qualité des sculptures dans la pierre, les détails sont mis en valeur avec une beauté de rendu remarquable.

C’est chouette, comme ambiance, les gens sont très souriants, on nous explique que chaque hindou doit venir ici au moins une fois dans sa vie. Sur les murs d’un des sanctuaires on remarque des symboles en forme de goutte d’eau, c’est le signe des vishnouites qu’ils portent aussi sur le front.

D’ailleurs il doit y avoir le soir une procession dans la rue devant le temple, alors nous décidons d’y revenir après être allés à l’hôtel faire une sieste pour cause de chaleur (encore dirons certains). Sachez tout de même que nous buvons à nous deux entre 5 et 6 litres d’eau par jour et on ne fait même pas pipi !!!

Quand on arrive de nouveau au temple en fin d’après midi on ne voit point de procession, juste une foule qui encombre la rue alors on suit, on remonte la file, on arrive en tête pour se rendre compte que ces gens là ne suivaient rien du tout, pas plus de défilé de divinités que de galettes-saucisses dans ce pays. Retour au temple, on a raté le coche, c’est ballot. Sauf qu’un type sympa nous explique qu’il va y avoir une autre procession, alors on attend sagement et en effet, on voit arriver un éléphant tout décoré (celui du chantier ?), une ribambelle de brahmanes en tenue (donc torse nu), le tout avec force musique de percussions et de vénérés gestes de dévotion de la foule au passage du cortège.

Notre informateur tient à nous emmener voir quelque chose d’exceptionnel, on le suit et arrive devant une sorte de grand hangar tout vitré, lequel contient un char de dimensions fabuleuses. Tout en bois sculpté , visiblement très ancien, cet espèce de monument monté sur roues en bois est sorti une fois par an, il faut cinq cent hommes pour le tirer durant les huit heures nécessaires pour faire le tour du temple (souvenez-vous que le temple est très grand, et l’engin roule moins vite qu’un tuk-tuk). Et il y a trois engins comme ça, dont un autre encore plus grand. Et comme ce n’est pas assez impressionnant comme ça, ils y ajoutent une structure en bambous pour le rendre plus haut et plus beau, dommage qu’on ne soit pas là au moment de cette procession. Faudra revenir…

Au prochain épisode, changement complet de décor, on passe au Kerala.

(en fait nous y sommes depuis belle lurette, au Kerala, mais vous savez ce que c’est : On manque de temps pour écrire les articles…)


Incredible India

En train avec entrain

On nous avait dit que prendre le train en Inde vaut son pesant de cacahuètes, mais que c’est très compliqué. C’est vrai et faux à la fois. Pour les cacahuètes, on va en reparler, c’est en effet assez folklo. Pour la complexité, ça dépend. On se rend à la gare la veille pour réserver, il faut remplir un formulaire assez abscons et long comme le bras, c’est tout juste s’il ne faut pas donner son pedigree jusqu’à la septième génération. Sauf qu’en fait, la guichetière explique que ça ne servait à rien, pour les 2° classe on ne réserve pas, on s’entasse. C’était bien la peine de faire la queue et jouer des coudes, parce qu’ici c’est le plus gonflé qui passe en premier au guichet.

Le lendemain donc, reste à comprendre comment ça marche dans ces drôles de gares où il y a foule de gens mais pas d’informations. Facile, en fait, il suffit de traverser les voies pour atteindre le bon quai, poireauter parce que le train a une demi heure de retard (ce qui n’a l’air de surprendre personne), se faire prendre en photos moult fois, s’engouffrer dans une voiture de seconde classe quand l’engin arrive enfin, et se rendre compte qu’il n’y a pas de place… Enfin si, il y en a dans les rares porte-bagages qui ne sont pas occupés par des gens qui dorment dedans.

Mais comme les tamouls sont gentils, ou ont pitié de notre air hagard (dans un train, c’est normal), ils se tassent encore un peu plus et nous trouvons un bout de banquette où s’asseoir, chacun dans un compartiment différent.
Ce qui est bien avec le train, c’est qu’on a tout le temps de voir le paysage, vu la lenteur, mais on n’est pas secoués comme dans les bus. Et la crasse des vitres ne gêne pas, puisqu’il n’y en a pas (de vitres, parce que la crasse, par contre…).
Donc, c’est plutôt sympa, le train, on remettra ça. Mais en longue distance, pour voir ce que ça donne dans les autres classes.

La vache et le cyclomigrateur
La vache et le cyclomigrateur

5 Comments

  1. Quel périple intéressant vous faites … et quel beau partage avec nous pauvres sédentaires ! Je ne sais pas pour les autres … mais moi, quand j’ai fini de lire un article … il me tarde déjà de voir le suivant !

  2. Avec cet article on a fait un peu de géographie avec Zoé pour monter où papi et nona sont partis.
    Et pourquoi la statue a plein de bras? Et pourquoi la dame elle a un point rouge sur le front? Beaucoup de questions pour se cultiver! Merci les cyclomigrateurs (et Wikipédia pour le complément 🙂
    Bisous

  3. Pour le train vous avez un site sympa et efficace c est Cleartrip.com site officiel indien. S y prendre un peu a l avance et avoir de quoi imprimer ( ils ne scannent pas encore le smartphone) merci pour vos belles photos et bienvenue au club des amoureux de l Inde 😉

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