Perlinpinpin

Tout ce qu’on vous conte cette fois-ci se passe à l’Île des Pins, qu’une agence de voyages décrit comme « Sublime, avec ses plages de poudre de corail et son superbe lagon ». D’où le subtil titre de cet article, lequel est assorti à la non moins subtile photo où transpire notre nostalgie des baguettes croustillantes bien d’cheux nous.

Pour vous mettre tout de suite dans l’ambiance, quelques photos montrant qu’il existe donc des endroits où hiver est plus beau qu’un été en métropole (surtout si c’est un mois d’août pourri) :

 

Au bout des Rouleaux

On a élu domicile au camping des Rouleaux, et c’était le bon choix : Il n’y a que nous, on a une plage magnifique à disposition, les cocotiers fournissent une ombre bienfaisante, on retrouve les joies du camping, ça fait du bien.

Pour arriver là il faut parcourir une piste un peu cabossée durant un kilomètre et demi, c’est peut-être ce qui dissuade les touristes avec leurs valises à roulettes ou même leurs sacs à dos, pour nous c’est impec à vélos.

Avant d’arriver sur ce petit coin de paradis nous avons du nous lever à 4h du matin pour prendre le Betico 2, le ferry qui dessert l’ile 2 fois par semaine, le dimanche et le mercredi et ne transporte seulement que des passagers piétons. Après 2 heures et demie de traversée, confortablement installés, nous retrouvons nos vélos, les passagers retrouvent leurs bagages qui ont été déposés sur le ponton. C’est un joyeux bazar pour retrouver ses sacs, valises, paniers tressés, et tout le fourbi que les iliens et vacanciers ramènent « de la ville ». Tiens nous voilà interpelés par une famille de brestois qui ont repéré le Gwenn ha Du !

On the road again

Car ça y est, « Panne » et « Cake » reprennent du service lestés du poids de nos sacoches ; après les dernières semaines en Nouvelle Zélande où on a fait de la voiture, puis du bateau, on avait bien besoin de se bouger un peu ; la banlieue de Nouméa ne nous a pas vraiment dérouillé les mollets.

La circulation sur l’île est très modérée, heureusement quand on voit certaines épaves qui nous doublent ou nous croisent…

Rassurez vous, elles ne sont pas toutes dans cet état là. Et c’est un régal de rouler sur les petites routes de cette ile, de papoter avec les locaux et de rencontrer des bretons à nouveau : Loïc et Thomas, respectivement de Port Navalo et de Marseille.

Passer l’isthme entre les plages de Kuto et de Kanumera est un régal pour les yeux, elles se dessinent en courbe parfaites de sable blanc bordées de pins colonnaires, de cocotiers et d’une végétation luxuriante au possible et baignées par des eaux limpides de couleur turquoise…. Oh que c’est beau !!!!

Bienvenue au bagne !

L’histoire de la Nouvelle Calédonie est marquée comme chacun sait par la déportation des prisonniers que les autorités françaises envoyaient « au bagne » sur des iles conquises loin de la métropole. Ces prisonniers devenaient une main d’oeuvre gratuite qui construisait routes et bâtiments publics, y compris leurs propres geôles. Le bagne de l’Île des Pins connut une activité de 60 années (de 1864 à 1924). Il est aujourd’hui totalement en ruine et la végétation reprend ses droits petit à petit. Nous sommes entrés à l’intérieur de ce que fût le mur d’enceinte. Bien que ces prisonniers pouvaient pour certains d’entre eux mériter des peines sévères, on sait que beaucoup d’autres furent condamnés pour de petits délits, voire leur orientation politique (durant la Commune de Paris). Triste passé qui nous laisse une gêne et une émotion à la vue des anciennes cellules recouvertes des noms gravés sur les pierres des murs décrépis.

En vélo à Vao

Le principal village de l’ile se nomme Vao et se trouve au sud de l’ile. Nous allons le découvrir en longeant la côte et visiter son église au toit de tôle ondulées rouges. Elle date de 1860, l’intérieur est doté d’un plafond en bois magnifique. Tout près nous découvrons le collège et discutons avec deux anciens qui nous disent que c’est ici qu’ils sont venus à l’école et que les temps ont changés… Ben oui, autrefois ici c’était l’école des garçons, aujourd’hui « tout est mélangé » !!!  Les méthodes éducatives ont aussi évolué, heureusement, à l’époque des Jésuites c’était très dur, les enfants étaient internes, avaient classe le matin et devaient travailler l’après-midi, ils n’étaient pas nourris, c’était aux familles de fournir les provisions et souvent ils n’avaient pas assez à manger alors que les prêtres ne manquaient de rien, eux.

Les habitations des tribus locales sont disséminées derrière les manguiers et les buissons fleuris des bougainvilliers,  souvent on ne les remarque guère mais on entend les « bonjour » chaleureux qui nous saluent de derrière la végétation. Sympa.

Les pins colonnaires

Ces grands arbres qui avaient impressionné le capitaine Cook sont en effet particuliers. Ce sont des pins colonnaires, endémiques de Nouvelle-Calédonie, pouvant atteindre 50 mètres de hauteur et qui ont la particularité de s’orienter vers l’équateur ;  ils poussent donc penchés, ce ne sont pas les photos qui le sont !!!

Et bien qu’on soit en « hiver » la végétation est luxuriante et les fleurs ne manquent pas. Pour répondre à nos amis cyclistes Frédérique et Daniel Tupin les températures oscillent entre 23 et 27 degrés selon les jours donc après la Nouvelle Zélande qui devenait humide et froide (15 à 18) tout est relatif ça ne gelait pas non plus sur l’ile nord, la Nouvelle Calédonie nous réchauffe et nous redonne les couleurs que nous avions perdues.

Hortense

Parmi les « attractions » de l’île figure la grotte de la reine Hortense.

C’est l’occasion de vous donner un aperçu des traditions locales, où on voit l’importance du droit coutumier :

La reine Hortense, de son nom kunié « Kânédje » était la fille unique du grand chef « Kaoua Vendégou » de l’ile des Pins.
Fille de chef, mais étant femme, elle ne devait pas théoriquement accéder à un rôle important dans la chefferie. Pourtant très tôt, elle démontra des capacités remarquables pour les études. Parait-il qu’elle serait la première femme mélanésienne à avoir su lire et écrire le Français. Sa forte personnalité la place d’emblée au sommet de la hiérarchie, assistant aux grandes cérémonies de la chefferie en spectatrice assidue, et présente aux cotés de son père lorsqu’il opta définitivement pour la France en 1853.
Son père, décédé et sans héritier mâle, avait pris la décision, quelque temps auparavant de marier sa fille à son neveu Samuel Vendégou pour lui succéder. Les fiancés étant âgés alors que de sept ans (!), un régent fut désigné.
Kânédje est alors baptisée et prend le nom d’Hortense. Se révèlant particulièrement intelligente, elle est  appelée la « jeune reine » et demeure à l’école Notre Dame.

Peu motivée par son futur mariage avec Samuel, Hortense finit par s’incliner et par épouser son cousin à la Pentecôte 1869, afin de rester proche de la chefferie. Son mari est nommé grand chef, mais Hortense détient en réalité le pouvoir coutumier. Ses oncles, écartés du pouvoir, ameutent la population en réaction. Avec l’intervention de la France, l’incident est rapidement réglé.
Après son abdication en 1883, la reine Hortense se retira à Saint Louis où elle mourut en 1900. Elle repose au cimetière de Vao, non loin du père Goujon, sous une modeste croix de bois. Encore aujourd’hui elle fait parler d’elle tellement son influence fut importante.

Maurice

Nous ne quittons pas Vao sans avoir poussé jusque la baie de Saint-Maurice peu après la grande chefferie.

 

On y arrive par une petite route bordée de jolies maison dont les jardins et les grands banians sont agrémentés de grosses boules de flotteurs multicolores des filets de pêcheurs. Un panorama sublime s’offre à nous, photogénique, éblouissant, en toile de fond le lagon d’un bleu de dégradés turquoise derrière lequel se dressent majestueux les fameux pins colonnaires. Un monument fort singulier se détache de ce décor. C’est la statue de St Maurice entourée de totems en bois, tous sculptés. C’est ici qu’a été célébré le premier service catholique en aout 1848 par les premiers missionnaires (Pères Goujon et Chanut). Les totems représentent tous les différents clans de l’ile avec chacun un visage et une expression différente. Ici comme ailleurs les cultures se juxtaposent et se mêlent bien, les gens savent composer avec les différences, c’est bien plus intelligent que de se battre pour imposer son point de vue.

 

Se balader sur cette île est très plaisant, il y a plein d’endroits « exotiques », on ne risque pas de s’ennuyer.

Les pirogues

C’est à la tombée du jour que nous arrivons au chantier de construction des pirogues à balancier traditionnelles dans la baie de St Joseph. Ca fait 55 bornes qu’on pédale aujourd’hui avec des détours charmants au fond des baies. Il nous en reste encore 15 à faire avant de retrouver notre camping, tant pis on s’attarde tout de même un moment pour admirer le travail des pêcheurs piroguiers qui construisent eux même ces embarcations dans les essences de Kauris ou de pins colonnaires. Nous aurions bien aimé rencontrer un de ces talentueux travailleurs du bois mais sans doute ont ils vu suffisamment de touristes aujourd’hui, ils sont partis se coucher pardi… Dormez bien les gars et bravo pour ce remarquable travail.

N’ga

Le mont local n’est pas d’une altitude impressionnante (262 m, moins que les 330 de notre montagne bretonne,  le Menez Hom !) mais la vue de là haut est bien agréable et la montée assez sportive : Ceux qui ont aménagé le chemin ont oublié de faire des zigzags, ça monte tout droit dans la caillasse, et il fait bien chaud. Mais ça vaut le coup, Petit Chat et Pople en sont témoins.

Les envahisseurs et le bougna

Dernière nuit à la Baie des Rouleaux, dernier matin et là, horreur et stupéfaction, une apparition inattendue nous saisit : Un immense paquebot de croisière arrive droit sur nous, un truc énorme, insensé, que vient-il faire là ? Qui plus est sur « notre » plage …..elle est à nous puisque nous y sommes seuls, non mais des fois !!!!
On l’apprendra plus tard, c’est le flot quasi hebdomadaire de touristes qui débarquent d’Australie, deux à trois mille croisiéristes à la fois !
Le paquebot ne pouvant accoster, il n’y a heureusement pas assez de fond, les chaloupes de sauvetage font la navette pour acheminer cette foule jusqu’à l’embarquadère, puis les touristes s’en vont s’agglutiner sur les deux magnifiques plages à proximité immédiate, c’est pratique il n’y a presque pas besoin de marcher. On les reconnait aisément, tous la même serviette de plage bleue et le badge autour du cou (de toute manière, en dehors de ces débarquements de masse, il n’y a quasiment personne sur ces plages).
Il y en a tout de même qui optent pour un tour de l’île en car, sans compter ceux qui filent dans les rares bars (celui de l’hôtel Méridien) parce que l’alcool y est bien moins cher qu’à bord.

Avantage de l’inconvénient : Les habitants de l’île ont préparé des stands avec des produits artisanaux et des plats traditionnels, c’est comme ça que nous avons pu déguster un excellent « bougna » alors qu’habituellement il faut le commander la veille.

Le bougna, kekseksa ?

Principale spécialité mélanésienne de Nouvelle Calédonie, le bougna est destiné aux grandes occasions (fêtes tribales, mariages…) ou pour honorer des hôtes. Il s’agit d’une sorte de ragoût composé d’ignames, de patates douces, de taro et de légumes avec de la viande, du poisson ou des fruits de mer. Le tout est mélangé à du lait de coco et enveloppé dans des feuilles de bananier, qui sont ensuite ficelées. Les papillotes ainsi formées sont placées entre des pierres chaudes dans un four en terre, recouvert de feuilles vertes pour conserver la chaleur et la vapeur. Après 1 heure 30 à 2 heures de cuisson à l’étouffée, il n’y a plus qu’à soulever les feuilles de bananier pour déguster un  plat succulent.

 

Une petite troupe se produit sur l’herbe près de la plage, entre les stands, c’est l’occasion de découvrir les danses traditionnelles. Curieusement, ça n’intéresse que très peu des croisiéristes qui passent sans s’arrêter, nous on reste avec eux tout le temps de leur prestation.

Tata !

« Tata » est la façon de dire « Au revoir ». Tata donc l’île aux Pins, belle et authentique, préservée des dégradations du tourisme de masse, ces quelques jours furent fort agréables. On y passerait facilement plus de temps, la douceur de vivre et la simplicité n’incitent pas au départ, mais on s’est laissés dire qu’il y aussi sur la Grande Terre de chouettes endroits à découvrir…

Un merci particulier aux propriétaires du snack de Kohu  où Krilisitina et Jean-Pierre nous ont ouvert leur table alors que l’établissement était fermé, nous proposant sandwich, pâtes et poulet coco cuisiné le tout arrosé d’un tonic cocktail aux fruits frais. Nous étions partis le matin sans provision, comptant trouver une épicerie d’ouverte, mais à force de trainer à droite à gauche on ne trouve rien à manger et d’épicerie point du tout. Krislisitina a fait une pause « ponçage de table » et Jean-Pierre une pause « enclos du cochon » pour passer un moment avec nous. Ces deux là nous ont une qualité de vie qu’ils savent se ménager et partagent volontiers leur expérience d’ilien. C’était le « lundi saint » : Quand Jean-Pierre s’est réveillé ce matin il a dit « Oh quelle belle journée ! » sa femme a tout de suite compris qu’il n’avait pas l’intention d’ouvrir le snack aujourd’hui (fermé le samedi et dimanche), néanmoins elle lui a suggéré fortement de s’occuper de construire l’enclos pour le cochon qui allait arriver dans l’après-midi !!!

 

Avant de quitter « notre » camping des rouleaux nous passons un moment avec les enfants de Gaby, le proprio. C’est ainsi qu’ils font connaissance de petit chat et de popple et des petits enfants à travers les photos que nous partageons avec eux. Raconter notre voyage aux enfants est source de plaisir et de joie, un joyeux moment où les questions fusent et les étonnements se lisent sur les visages, on aimerait rester encore mais le bateau va partir sans nous ….Tata les enfants….à plus tard, un jour, ailleurs……

5 Comments

  1. Bonsoir …On dit que l’île des pins c’est l’île la plus près du paradis…ça doit être un peu vrai..faîtes de beaux rêves !

  2. Merci de nous ramener quelques mois en arrière ! L’île des pins et sa douceur de vivre.. On vous rejoint tout à fait là dessus ! Avez-vous vu la piscine naturelle et la baie d’upi ? Bisous des z’oreilles en cours de réadaptation dans leur pays natal ! 😉

  3. ohh quelle emotion de vous lire et revoir cette île qui nous a charmées…Merci.
    allez vous également visiter les îles loyautés?
    nous vous embrassons
    les filles de St Gin

  4. Toujours aussi magnifique l’Île des Pins. Sympa la baignade en Nouvelle Calédonie ! Heureuse de vous savoir enfin « au chaud » après les glaglas néozélandais. Bizz Ann Mary

  5. Je sens bien que vous allez beaucoup vous plaire en NC… Voudrez vous en repartir? Tout y est si tranquille. Profitez de ses instants là, vous en avez de la chance!

1 Trackback / Pingback

  1. Fujisan – Les Cyclomigrateurs ☺︎

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