Le descriptif du Lonely Planet a de quoi faire saliver :
« Lovée entre la montagne et la mer, cette route offre une épopée mémorable au cycliste (bien) averti : n’oubliez pas qu’il y a peu d’infrastructures et de rares endroits où trouver à manger ou à boire en chemin, et qu’en cas de problème, vous ne croiserez que très peu d’autres véhicules. Par ailleurs, bien que la route suive largement la mer, elle présente des dénivelés qui nécessitent un bon jeu de vitesses et une parfaite condition physique.
Heureusement, cette lenteur imposée est idéale pour apprécier la beauté sublime des paysages. Ce coin isolé du sud-est de Cuba, formidablement préservé, déroule un ruban splendide de baies secrètes léchées par l’océan, sur fond de hautes montagnes drapées de nuages. La route serpente sur les contreforts des deux plus hauts massifs cubains, où culminent le Pico Turquino et le Pico Bayamesa »
Pour une fois, la réalité est largement à la hauteur de ce que vante le guide, et même au delà : Un circuit sublime, une route défoncée, une côte magnifique, des tunnels effondrés, des montagnes mystérieuses, des ponts écroulés, des passages surprenants, ainsi qu’un anniversaire en enfer (mais ça le Lonely ne pouvait pas le prévoir).
Vers l’Est
Quitter Santiago n’est pas bien difficile, on se retrouve très vite hors agglomération et on laisse derrière nous les ouvriers qui s’en vont bosser à pieds, à cheval, en voitures, en camions bennes, en camions cubes, en collectivos des années 50, à vélo, en tracteur… Bref tout ce qui peut rouler et qui soit capable de transporter hommes, marchandises ou bêtes. Les écoliers nous acclament, ils commencent en général l’école à 7h30. Beaucoup sont sur la route à partir de 7h00, marche à pieds oblige.
Au vingtième kilomètre c’est assez joli parce que nous avons rattrapé la côte, bananeraies et cocotiers la bordent. Des petites criques accueillent des centres hôteliers, on traverse les petits hameaux où les paysans travaillent aux champs avec les boeufs.
Une petite pause pour manger enfin notre succulent petit déjeuner, nos petits sandwichs jambon fromage que nous a préparé Lizandra. On ne choisit pas un spot crado mais une baie où il n’y a pas un chat, décor de carte postale juste pour nous deux. Un monsieur est en train de nettoyer sous les pagodes. Quand on s’installe sur les pierres en guise de sièges il s’en va dans une des cabanes proches et revient avec deux fauteuils en bois qu’il pose bien à l’ombre face à la mer ; un geste emprunt de sympathie pour deux « cheveux blancs ».
Rio Seco
50 km plus tard c’est la playa Franceses qui nous tend les bras. Tout près, l’édifice d’une imposante cafétéria se dresse devant nous, chic on va y casser la croute ! Déception profonde, elle est complètement en « dévarinade », toilettes fermées, une partie du toit s’est envolée. La jeune femme qui se tient au « comptoir » ne peut nous proposer que des jus de fruits maison : On est preneurs. Et des sandwichs au jambon, là on n’y tient pas quand on voit la tronche de ceux qu’elle vient de servir à un client. Jeûner fait du bien au corps !
Nous allons nous réfugier à l’ombre des ubas, ces grands arbres aux branches généreuses, déplier nos petits sièges, buller devant le spectacle des vagues qui montent à l’assaut de la plage. Tout à côté, a fait de même un groupe d’hommes qui vendent des noix de coco, c’est avec plaisir que nous allons nous offrir une agua de coco fraiche et pure. Une femme vend des bananes qui vont faire le bonheur d’Irène.
L’endroit est charmant sauf qu’il n’est pas vraiment discret pour y planter une tente parce que finalement il y a toujours un va et vient des habitants qui reviennent des champs avec leurs chevaux, ou bien tout simplement des petits curieux qui viennent voir ces deux cyclistes qui ont planté leur siège près de leur plage préférée. Alors nous allons tranquillement nous éloigner pour arriver à un camp militaire : interdiction d’entrer !!! Pourtant il n’y a aucun militaire en vue, juste un gardien. Poussons un peu plus loin, par un petit sentier qui mène à une plage. Nous sommes surpris d’y trouver des maisons qui ressemblent plus à des cabanes améliorées, entourées de clôtures et de végétation dense. Des chiens nous accueillent et Miguel sort de sa maison. On lui demande l’autorisation de camper sur la plage, si on a besoin de quelque chose on vient le voir nous propose-t-il.
C’est notre tout premier bivouac à Cuba, enfin ! Nous allons monter la tente sur le sable en essayant de nous protéger des rafales de vent grâce à la haie de palétuviers. On entreprend alors de ramasser le bois mort en guise de sardines et attachons solidement les haubans. Miguelito, le fils de Miguel, vient nous tenir compagnie. C’est un enfant de 11 ans curieux, très à l’aise, il veut devenir biologiste marin. Il est très attentif à tout ce que nous faisons. Nous en profitons pour lui montrer le traducteur sur le mobile qui nous aide à le comprendre. Il se met en tête de le télécharger sur le mobile de son père. Hélas impossible, il n’y a aucune connexion internet à des kilomètres.
La cuisson des pâtes et de la soupe ne le laisse pas indifférent, mais il ne veut pas en manger et file chez lui pour prendre sa douche et son repas.
Nous allons chercher de l’eau et saluer nos voisins pour la nuit. Outre Miguel et son fils Miguelito, vit également ici « Conception de la Nuevo Allemane », c’est la grand mère de Miguelito ainsi nommée parce que sa mère était d’origine allemande. Elle a hérité de ses yeux bleus. La maison est on ne peut plus modeste : Pièce de vie séparée par des rideaux de la partie « nuit », pas de cloisons ni portes. Miguel est infirmier en dialyse à Chivirico, à 20 km, il n’a pas de moyen de locomotion et se rend chaque jour au boulot en allant au bout du chemin attendre le premier moyen de transport qui passe, n’importe lequel. Poules, poussins, canards et le cochon vivent autour de la maison. Un petit jardin de cultures vivrières assurent un plus à ces gens.
Nous avons eu en début de soirée la visite d’un couple de « volontaires » chargés de surveiller la plage, « pour que les bateaux jamaïcains ne débarquent pas avec de la drogue » et s’assurer que nous sommes en sécurité ! Ils nous vantent les bienfaits de la révolution, chose que nous nous gardons bien de contester. Ils sont chaussés de bottes déchirées, vêtus de vêtements approximatifs, le zèle ne paie pas. L’homme nous dit que les enfants sont élevés également avec un sens du civisme, de la vigilance et deviendront de parfaits « volontaires ». N’est-ce pas, Miguelito ? Ils savent que nous sommes installés sur la plage, tout va bien, nous sommes sous bonne garde.
La nuit va être agitée avec puissants coups de vent qui nous font craindre de nous envoler vers le large, mais la tente a tenu le coup. De plus nous y voyions comme en plein jour grâce à madame la lune qui nous a généreusement offert sa luminosité !
Chivirico
Nous quittons ce petit coin perdu isolé sous les arbres ainsi que Miguelito et sa grand-mère pour continuer notre route poussés par un fort vent de nord-est, ce qui nous arrange bien. Nous n’arriverons pas trop tard à Chivirico, petit village de 5 000 habitants, au pied du mont Turquino. Ce village semble prospère, il bénéficie de la manne touristique grâce à ses eaux limpides qui accueillent les clubs de plongées. Un complexe hôtelier construit au sommet d’un promontoire avec vue imprenable où les canadiens sont bien implantées fait vivre correctement le village. Nous trouvons une chambre chez Lizbeth, une famille de santeria, tous habillés de blanc. Nous y déposons nos sacoches et partons à la découverte des lieux.
« La santeria est le plus mystérieux des – nombreux – aspects mystérieux de la culture cubaine. Syncrétisme dans lequel les croyances africaines ont été dissimulées derrière une foi catholique de façade, la santeria est le produit de l’esclavage mais reste profondément ancrée dans la société cubaine. Plus de trois millions d’habitants se reconnaissent aujourd’hui adeptes de la santeria dont les rites, comme les sacrifices d’animaux, sont parfois cruels »
Contrairement à certains autres pueblos, Chivirico a la chance d’avoir un magasin correctement achalandé. On y fait quelques provisions pour la route, style sardines et thon. Luxe suprême, nous y trouvons un paquet de « langues de chat ». On se demande encore où elles ont été fabriquées ces langues de chat, parce le goût est loin d’égaler celles que nous connaissons. Pour autant on a tout boulotté, finalement on s’accommode facilement de ce que l’on trouve. La boulangerie a ses caisses en plastique remplies de petits pains ronds, on les soulage de six unités. Discussion avec une vendeuse dans une petite boutique où quelques étagères exposent 3 savonnettes et 2 tubes de dentifrice. Confirmation que le salaire moyen est bien de 20 $ (CUC) par mois pour 10 heures de présence quotidienne, sachant que les clients ne se bousculent pas au portillon les vendeuses ont de quoi s’em…der ferme, ça ronronne là dedans sauf quand une voyageuse un peu curieuse vient se taper la discute avec son espagnol appris sur le tas ! On se quitte avec des voeux pour un avenir meilleur. Que peut on souhaiter de plus ?
Notre petit déjeuner est prêt pour 6h00, chose qui ne pose pas de problème (pas comme à Santiago). Néanmoins nous sommes réveillés depuis fort longtemps ; les coqs du voisinage sont venus chanter jusque sous nos fenêtres. Coqs, poules, poussins, il y a de la volaille partout.
La Mula
Si vous vous demandez quand on va aborder les fameux tunnels effondrés et ponts écroulés, patience, ça vient. Pour le moment, les paysages sont toujours aussi superbes, avec une route un peu bancale qui monte et descend tout le temps mais demeure praticable, et toujours aussi peu de trafic.
La carretera Granma est ainsi nommée parce que c'est le nom de la province. Lequel était celui du bateau que Fidel Castro a utilisé en 1956 pour revenir à Cuba après son exil au Mexique. Grandma est également le nom du journal quotidien du Parti communiste cubain, qui tient plus de l'outil de propagande que de réelle information.
Nous longeons le Parc National Pico La Baya Mesa. Soudain, au bord de la route, on découvre un chevreau qui a l’air mal en point, il respire difficilement et a du mal à se tenir sur ses pattes ; il souffre peut-être du soleil de plomb. Irène l’emmène à l’ombre et lui donne de l’eau, sa mère s’approche. Il serait temps qu’elle allaite ce chevreau qui halète et chancelle.
Autre rencontre, un maitre et ses élèves qui s’en vont à pieds, avec une fleur à la main, jusqu’à un monument de la révolution. Chaque village, même très petit, a une école reconnaissable par le drapeau cubain ou le buste blanc de José Marti. Parfois il n’y a qu’une vingtaine d’élèves dans l’école, au moins ils ne connaissent pas les classes surchargées.
A El Uvero, le village semble prospère, joli avec les maisons entourées de végétation, séparées les unes des autres par des jardins fleuris. C’est un haut lieu de la révolution, qui a commencé par ici. Pour une fois, nous croisons des cyclistes, ils sont cinq et voyagent léger mais n’ont apparemment pas le temps de s’arrêter pour discuter. Ils ont à la fois le soleil et le vent dans le nez, mauvais choix.
A Uvita, après une descente assez prononcée prise au ralenti, vu l’état de la route, on est obligés de pousser dans la loma de la Bruja. Les lomas, ce sont les côtes. Quand elles sont petites, ce sont des lomitas, c’est mignon, non ?
Le campismo de La Mula
Un campismo cubain, c’est un camping où on ne peut pas camper. On loge dans des cabanes en dur, plutôt rudimentaires. Ce soir là nous sommes les seuls clients, bien que tous les cyclistes qui passent sur cette route s’arrêtent ici pour la nuit car c’est une étape incontournable.
Ceint de hauts murs, l’endroit n’est à priori pas super accueillant mais en fait ça va. La grève est belle, il n’est cependant pas question de se baigner, les courants sont trop dangereux. Il y a une flopée de personnel, en cette saison creuse ils n’ont pas grand chose à faire. Pain avec sardines et pâté pour le pic-ni, le soir c’est plus évolué puisque le cuisinier nous concocte un repas fort correct pour un prix tout aussi correct. Au moins il n’est pas venu au boulot pour rien. La serveuse non plus, comme elle s’ennuie ferme on l’initie au Kwirqle et elle s’en sort très honorablement.
Elle est passée où, la route ?
Gros doute à une intersection au village de Ocujal après avoir franchi un grand pont un peu bancal mais qui a le mérite de ne pas s’être encore écroulé : A droite une petite route s’en va vers la montagne, à gauche une tout aussi petite route plonge dans la mer. Le GPS tranche, c’est à gauche, on doit toujours longer la mer, de toute façon à droite c’est un cul de sac. Un type qui arrive à pieds d’on se sait où nous le confirme, il passe tous les jours par là pour aller bosser ; c’est un prof d’anglais, il parcours cinq kilomètres pour rejoindre son école chaque matin, autant le soir. Rien d’insurmontable, direz-vous, sauf que le tunnel par lequel passait la route s’est effondré depuis belle lurette, alors il faut passer au pied de la falaise, là où la mer recouvre à marée haute ce qui ressemble à un vague passage caillouteux et sableux. Quand il y a des tempêtes, c’est plutôt dangereux d’aller au boulot par ici !
Un autre type arrive avec son vélo, lui et le prof nous aident à pousser les vélos sur ce passage scabreux, ce qui est bien gentil et opportun. Idem sur un second passage qui n’est guère mieux, il faut passer dans le sable entre deux vagues. Vu que la mer emporte de plus en plus de morceaux de cette route, viendra un jour où elle sera complètement coupée et ce sera catastrophique pour les villages aux alentours.
De toute la journée on ne verra qu’un unique camion et une voiture de tourisme sur cette route. On apprend qu’il n’y a de transport en commun que trois fois par semaine, un camion 4×4 dont l’arrière est aménagé en car sommaire (un « carmion »). Il vaut mieux ne pas le rater…
A partir de là, on oublie l’asphalte, il y en a peut-être eu avant la révolution, et encore n’est-ce pas sûr. Mais peu importe, c’est sans aucun doute le plus beau parcours qu’on puisse trouver dans ce pays. Il ne présente pas de très grosses difficultés et vaut très largement les efforts pour le parcourir.
Le village de La Plata est également un haut lieu de la révolution, ce qui explique probablement sa drôle de façon de souhaiter la bienvenue. C’est sacrément isolé par ici, les gens qui y vivent se connaissent sans doute tous mais n’ont guère la possibilité de se déplacer pour aller en ville.
El Macho
Au village de Magdalena, juste avant El Macho, on retrouve de l’asphalte, ça roule quand même mieux. On donne deux sandwiches à deux hommes qui coupent du bois dans les taillis afin d’alimenter le four à pain, ils ne disent pas non. Donner du pain à des types grâce à qui le pain est fait, c’est de l’économie circulaire.
Sylvestre le cantonnier est fort volubile, il est content de raconter des tas de trucs qu’on ne comprend pas, c’est un personnage fort attachant. Avec tous les trous qu’il y a sur la route il a de quoi s’occuper, surtout que les cailloux qu’ils met seront emportés au prochain passage de camion, heureusement qu’il n’y en a pas souvent. Plus loin, Diana, jeune maman de vingt cinq ans avec ses deux petits de trois et six ans nous propose de remplir nos gourdes à son puits, dans lequel la maman vient puiser l’eau.
El Macho ne compte gère plus de 500 âmes. On s’en va vers la plage avec l’intention d’y bivouaquer, tout le village est immédiatement au courant. Là bas la vue est magnifique, il y a des arbres pour bénéficier d’une ombre bienfaitrice, que demander de plus ?
Cette partie de la côte est superbe, on apprécie la tranquillité des lieux, bien installés dans nos petits fauteuils confortables ; seules fourmis viendront troubler cette quiétude, elles sont fort agressives.
Diana nous rejoint avec ses bambins, elle n’a pas grand chose à faire de ses journées ; elle est bien contente de venir découvrir comment vient les voyageurs sur la route en mode nomades. Un peu plus tard un couple arrive, c’est Rob le « responsable de la salle TV » mais également du village ; il nous conseille de venir piquer la tente près de la salle car la plage n’est pas sûre « il n’y a jamais eu de problèmes mais on ne sait jamais ». En fait, il est probable que personne ne soit jamais venu camper là, ça déconcerte les gens car les Cubains n’ont pas du tout la culture du camping.
Après notre dîner à la plage à la nuit tombante, nous nous installons dans la maison de la soeur de Rob. C’est minimaliste, des murs en ciment et un toit en tôle, pas d’eau courante mais une citerne dans la cour, pas d’électricité sauf quatre heures par jour. La cuisine se résume à un brasero alimenté au bois à l’extérieur. Les cochons et volaille courent autour de la maison, dans la cabane toilettes on trouve un livre de l’histoire de Cuba, pas pour lire évidemment. Ca nous fait rire franchement de constater comment finissent ces pages d’histoire.
Dans le congélateur, qui ne fonctionne donc pas souvent, un poisson qui tourne de l’oeil, et des bidons d’eau. Il n’y a pas de sièges autour de la table, seulement 2 vieux « balance » (rocking chair) on s’assoit sur des sacs de ciment ou sur des bidons en plastique retournés.
Bien qu’habitent ici deux enfants de 7 et 9 ans, il n’y a aucun jouet. Pour se distraire, tous les deux remplissent les cases d’une vieille libretta, le carnet de rationnement, c’est déjà l’apprentissage des restrictions.
Réveil à 5h30, il fait encore nuit, on cuisine notre porridge sous l’oeil de Guisa, jeune femme timide. Elle nous amène un petit banc pour qu’on soit mieux installés puis file allumer le feu de bois pour son petit-déjeuner et celui des enfants.
Quand on entend que tous les Cubains sont égaux, c’est en oubliant tous ces pauvres gens qui vivotent dans de petits villages isolés, oubliés de tous.
De loma en loma
La route continue d’alterner passages plats tout près de la mer et plus pendus dès qu’on s’en éloigne, avec des lomas (côtes) bien costaudes mais qui ont l’avantage de permettre d’avoir une vue panoramique une fois arrivés en haut.
Des travailleurs s’en vont bosser dans la montagne, machette à la ceinture et provisions sur le dos. La révolution a commencé ici et ça se voit, il y a de nombreux slogans en mémoire de Camillo Cienfuegos, Célia Sanchez Manduley, figure féminine de la région. Le cheval est le moyen de locomotion privilégié dans ces régions montagneuses, sinon c’est la marche à pieds.
La réserve écologique de El Macio témoigne des efforts entrepris par l’Etat pour la protection des espèces végétales endémiques. Un bon point.
Un drôle de panneau mentionne une section en mauvais état, ce serait plus simple de mettre un panneau quand quelque chose est en bon état, il en faudrait moins.
A un endroit nous décidons de tourner une vidéo farfelue montrant comment on fait sécher le linge entre deux vélos, sous les yeux écarquillés de Pedro et Mario. Pour la peine, ils ont droit à une boite de rustines et des biscuits ; cette séquence a sans dû faire causer dans les chaumières, ils ne sont pas près de revoir ça. Quant à vous, vous n’êtes pas près de voir cette vidéo non plus, elle fera partie d’un futur film lorsqu’on sera rentré, il faudra patienter.
Marea del Portillo, un autre monde
Plusieurs fois, des Cubains nous ont demandé si on allait faire étape à l’hôtel de Marea del Portillo ; ça ressemblait plus à une confirmation qu’à une question, tant il semble évident que tous les étrangers aillent là. Sauf que nous, on n’aime pas trop les hôtels, on préfère camper quand c’est possible, sinon aller chez les gens.
Quoiqu’il en soit, quand on arrive en vue de l’hôtel il est près de midi, on décide de s’arrêter à son restaurant pour le déjeuner. C’est l’anniversaire d’Irène, soyons fous ! A peine la porte de l’établissement franchie, on pénètre dans un autre monde…
Piscine (alors que la mer est tout près), chaises longues, palmiers, fauteuils profonds, salons, boutique bien achalandée de produits et gadgets importés, il y a tout ce qu’il faut pour satisfaire le client. Le programme des activités de la semaine fait penser à une maison de retraite : Aquagym, loto, promenade, etc. La plupart des clients sont canadiens, ils viennent passer une ou deux semaines ici, le petit aéroport le plus proche a une ligne directe vers Montréal. Vu que c’est une formule All inclusive (tout compris), ils ne sortent pas de l’établissement, excepté pour aller à la plage à 600 mètres en voiturette électrique parce qu’à pieds ce serait trop fatiguant, ou en groupe dans le cadre des activités organisées.
Le restaurant ouvre à midi, on nous a demandé de payer d’avance, ce qui surprend. On comprendra vite pourquoi, c’est un buffet, on se sert à volonté. Et la volonté, ce n’est pas ce qui manque aux clients de l’hôtel : Midi sonne à peine que la horde déboule, certains se précipitent sur les desserts pour se servir (des fois qu’il n’y en ait plus après) et les emmener à leur table favorite ; alors que le buffet est très abondamment garni (on n’a jamais vu une telle quantité de nourriture à Cuba), les assiettes se remplissent au maximum.
Durant le repas, on se regarde, il s’avère qu’on est bien sur la même longueur d’ondes : « Quelle horreur cet endroit ! Jamais ça, même quand on sera vieux ! ». Du moins encore plus vieux !
Au moment de quitter la table, nombre d’assiettes sont loin d’avoir été vidées, les gens en ont pris bien plus qu’ils ne peuvent manger, alors qu’ils auraient pu se re-servir s’ils en avaient envie. Quel gâchis ! Il ne semble même pas leur venir à l’idée qu’il y a autour d’eux des gens qui ont du mal à s’alimenter suffisamment, que ce soit le personnel de l’hôtel ou tous les habitants de la région.
On en a confirmation en discutant avec un client canadien qui nous affirme que « les Cubains sont bien ici, ils ont le soleil, la mer et la nature » ; quand on lui rétorque que ce n’est pas si idyllique, comment vivent les gens qu’on a rencontrés ces derniers jours, ça n’a pas l’air de le toucher. On se retient de lui faire remarquer que le prix de sa semaine à l’hôtel représente deux ans de salaire de la femme de chambre ou du cuisinier qui sont à son service.
Vite, fuyons ce cauchemar !
Pilon
Sous une chaleur accablante, nous atteignons Pilon au bout d’une vingtaine de kilomètres. Malgré cette proximité avec le fameux hôtel cité ci-dessus, aucun occidental n’y vient, ayant peut-être peur de se retrouver en contact avec les Cubains.
Seule ville de quelque importance dans la région, il faut reconnaitre qu’elle n’a guère d’attraits. La raffinerie de sucre a fermé il y a une dizaine d’années (comme la plupart de celles du pays) engendrant du chômage. La région s’est alors tournée vers l’agriculture urbaine, nous avons en effet pu voir des serres de tomates et des champs d’oignons. Il ne subsiste que quelques petites entreprises délabrées, dont une de carrelage, auprès d’un vague petit port dont la jetée a disparu depuis longtemps, sans doute emportée par un ouragan.
Sur le malecon des gamins pêchent, jouent et plongent, de vrais poissons. Le chien aussi plonge, mais lui ne l’a pas fait exprès, les gamins ne lui demandent pas son avis, pas grave, il nage très bien.
On s’est fait alpaguer dès l’entrée de la ville par Daulemis, une jeune femme à vélo qui nous attendait depuis la veille pour nous conduire à la casa de sa mère Lidia. Tout juste si elle ne nous reproche pas de ne pas être arrivés hier ! Le téléphone arabe cubain fonctionne toujours aussi bien, pas moyen de passer inaperçus et ça commence à être gonflant, on aimerait être libres de choisir où on va dormir. Néanmoins, la soirée est sympa, notre hôtesse offre un cadeau d’anniversaire à Irène, un joli petit collier dans une boite fermée par une rose. Le dîner est bon (crevettes et poisson) et copieux à tel point qu’on n’arrivera pas à terminer le plat (Y’a de bons restes).
Le lendemain, on décide de rester un jour de plus mais on change de crèmerie, c’est bien aussi d’aller chez des gens qui ne viennent pas vous racoler sur la route. Visite « guidée » du musée de Célia Sanchez qui fut la première femme chef d’escadron de combat. Elle était la fille d’un médecin de Manzanillo, elle est décédée le 11 janvier 1980 à l’âge de 59 ans à la Havane. Le guide en question ne nous quitte pas d’une semelle, nous avons refusé de payer 3 $ pour l’appareil photo, promettant de ne pas en prendre, pour en être certain il va nous coller au train tout le temps de la visite.
Notre hôte Humberto nous suggère un « bon » restaurant pour le soir, en fait il semble qu’il n’y en ait pas d’autre de toute façon ; il s’avère que l’établissement ressemble à un hangar, la cuisine est des plus banales et il n’y a même pas moyen d’avoir à boire, on nous envoie chercher des canettes sur la place du patelin où règne une ambiance de samedi soir avec cochon grillé et musique à rendre sourds tous les habitants du quartier.
C’est ici que se termine notre parcours le long de la mer des Caraïbes. Veni, vidi, vici : On est venus, on a vu, on a survécu.
Nous étions dans les conditions idéales : Vent dans le dos, soleil itou, en hiver (car en été ce doit être horriblement chaud), et surtout à vélos car il n’y a pas d’autre moyen de découvrir cette côte. Amis cyclistes, venez pédaler par ici, vous ne le regretterez pas !
Bon anniversaire Irène ! Reine du jour sur petite reine d’amour pour voir le monde, c’est beau, ça ! Même si je suis en retard…c’est dit quand même ! Magnifique loma pour des limas à roulettes ! Merci ! Continuez bien ! Je voyage avec vous ! Si, si, si ! Je ne prends que la place d’un bouquet de pensées ! Bises ! Marie
Un vrai régal de vous suivre dans votre aventure, j’ai l’impression de voyager aussi…avec un peu plus de confort quand même.
Merci pour vos récits et photos.
Bonne route,
Pascal
Bravo j adore votre façon de voyager sur vos vélos , et puis nous en prenons plein les yeux par ces belles photos, dite moi a quelle époque être vous ! ou j ai du rater un épisode .
un grand merci a vous deux .
gilbertdu13
Bien belle découverte de Cuba que celle que vous nous offrez en plusieurs épisodes.
Grand merci à vous et, surtout, bon anniversaire Irène !
Fêter cet événement à Cuba, sous le soleil d’hiver, dans l’opulence de la bonne compagnie est un must…
Bonne poursuite de votre voyage.
On vous embrasse.
Il y a du rythme dans vos ballades ..tout s’enchaine à merveille…bravo …merci…
Toujours aussi belles les photos les contrastes et les paysages…….
Ca maintient l’envie de partir et puis on a un point en commun je viens de fêter moi aussi les 62….
Continuez et surtout ne lachez rien
A+
Jeffry
tout simplement formidable c’est agréable de voir de si beaux paysages tout en restant derrière son écran tout pleins de bonnes choses pour vous gros bisous et bonne continuation
Merci pour ce superbe reportage sur Cuba…. et bonne route