Migration du nord du sud au sud du nord

La dernière fois nous vous avions laissé sur un suspense insoutenable, voici enfin qui va vous permettre de respirer à nouveau. Nous ne partons pas de Greymouth à vélos car… nous partons en car, tout simplement. Ben pourquoi, vous demandez-vous sans doute ?
A moins que vous n’ayez suivi nos récits passionnants que de manière épisodique (ce qui serait bien regrettable, vous perdriez quelque chose, c’est plus intéressant que les élections), vous avez compris deux choses essentielles :

  • L’hiver arrive
  • La Nouvelle Zélande est composée de deux grandes îles (plus quelques confettis)

Or ça fait bientôt deux mois qu’on est sur l’Île du Sud, là où ça va cailler le plus, il serait judicieux de migrer au Nord pour y trouver des cieux plus cléments. On va donc mettre un peu le turbo pour grimper au Nord de l’Île du Sud afin d’arriver avant la neige au sud de l’Île du Nord. Ça va, c’est clair ? Sinon filez donc voir notre merveilleuse carte « Ouskison ? », qui est d’ailleurs mise à jour presque en temps réel, contrairement aux articles qui ont demandent un certain temps avant de vous parvenir :

 

Nous voici donc dans un car pour Wakefield. Le chauffeur est du genre grincheux, mais les $20 qu’il met dans sa poche sans donner de reçu contribuent sans doute à lui faire accepter de charger nos vélos. C’est un trajet de 5h30 longeant la côte, certaines sections sont particulièrement étroites. C’est impressionnant, la route est juste au bord de l’eau, il n’y pas de plage et de l’autre coté ce sont de grandes falaises abruptes. En cas de tsunami, pas moyen de se débiner.

Les pancakes

Ce qui est bien avec les cars kiwis, c’est qu’ils s’arrêtent de temps en temps dans des endroits vraiment sympas. Et comme le chauffeur fait aussi office de guide, on a l’impression d’être en voyage, pas seulement bêtement trimballés d’un point à l’autre comme dans les « Ouibus » chers à un certain président.
Dans le cas présent, on s’arrête pour une demi-heure aux Punakaki Pancakes Rocks. Et une demi-heure, ce n’est pas de trop car le site est vraiment remarquable avec ses Blow Holes : Ces cavités dans lesquelles la mer s’engouffre et rejaillit en geysers sont autrement plus impressionnantes que celles qu’on avait pu voir sur la côte Ouest de l’Australie, où pourtant on avait déjà été épatés.

On traverse de petites villes, Charleston, Westport puis ce sont les montagnes, rivières, vallées, gorges, c’est splendide avec les couleurs du soir qui arrivent petit à petit.

The Great Taste Trail

Voilà un nom de circuit qui donne envie, n’est-il pas ? C’est pour cette raison que nous quittons le car dans l’obscurité et le minuscule patelin de Wakefield. Il n’y a personne d’autre à descendre, tout le monde dort jusqu’à Nelson.

Après un bref remontage des vélos sous les lumières bienvenues de la station service, on se dirige vers un freecamp où on fera la popote à la lampe frontale. Et le lendemain c’est reparti pour le vélo sur de petites routes tranquilles, loin de la circulation et du bruit, ça fait du bien.

La Pigeon Valley est toute verdoyante et en lacets puis c’est une gravel road aisée à monter. Les « localités » de Dovedale  et Thorpe, qui sont en fait des hameaux de quelques maisons éparpillées, sont autant de lieux de vie dans ce paysage où les animaux paissent paisiblement. Sauf les cochons qui grognent en nous voyant arriver, comme des chiens qui aboieraient ; ils ne savent pas la chance qu’ils ont de pouvoir gambader quand leurs pauvres congénères bretons ne savent pas que l’herbe existe.

Woodstock

Avec un nom pareil, on pouvait s’attendre à trouver au moins un endroit pour boire un coup, mais non, rien, que dalle, macache, nada ! Il y a, en tout et pour tout, qu’un stock de bois, ce qui est somme toute logique.

Pas grave, on sort nos fauteuils merveilleux et on pique-nique près du tas de bois, en attendant de reprendre la route qui est toujours aussi chouette avec ses collines collineuses, ses petits ponts aux barrières bleues, ses rivières et ruisseaux glougloutant à tout va.

 

Comme par chance le téléphone fonctionne dans ce trou paumé, on passe un coup de fil à Dean et Petreah qui habitent Brooklin, près de Motueka à 30 km de là. Nous les avions rencontrés au bord du lac Brenner et ils nous avaient gentiment invités.

La Motueka Valley excelle dans la production de fruits: Pommes, kiwis, poires, fruits rouges, olives, houblon. D’où le nom de Great Taste  donné à cet itinéraire, il y a des stands de vente de fruits à tous les coins de chemin, il suffit de se servir et mettre les sous dans la boite.

Nous sommes comme des coqs en pâte chez nos hôte : Une belle chambre avec matelas chauffants, une salle de bains privative, même les vélos ont une chambre dans le garage.

Petreah et Dean ont invité à l’apéro Madeleine, française mariée à un kiwi, très drôle avec sa coiffure originale.
Le dîner autour d’une beau plat de poisson sera l’occasion de faire plus connaissance avec nos hôtes, tous deux retraités.

Le lendemain on ira découvrir la Golden Bay en voiture. Direction Takaka Hill, la route est très grimpante (en voiture c’est facile), il y a un très beau point de vue à Hawks, un lookout qui donne sur la vallée. On découvre les  Tea Tree Manuka et Kanula qui poussent en grand nombre en Nouvelle Zélande.

On se rend ensuite en un endroit très particulier, les sources de Waikoropupu, lieu sacré des Maoris.

Les Waikoropupū Springs sont les plus grandes sources d'eau douce en Nouvelle-Zélande, les plus grandes sources d'eau froide dans l'hémisphère sud et contiennent l'eau la plus claire jamais mesurée (la visibilité est de 63 mètres). Le débit est impressionnant : 14 000 litres d'eau par seconde.
C'est également un habitat remarquable pour les mousses submergées, y compris au moins une mousse qui ne se trouve nulle part ailleurs.

Pour les Maoris locaux, Te Waikoropupū Springs est un taonga (trésor) et wāhi tapu, un lieu de haute considération culturelle et spirituelle. Les eaux des sources de Te Waikoropupū sont fermées à toutes formes de contact (pêche, natation, plongée, navigation) afin de préserver la qualité de l'eau et de respecter leurs valeurs culturelles.

Ignorant sans doute tout cela, un charmant petit oiseau se livre devant nous à des contorsions amusantes, on dirait qu’il prend plaisir à prendre la pose pour nous, c’est le fantail.

Nos hôtes, qui connaissent le coin comme leur poche, nous proposent d’aller à la pêche ! Mais comme il est midi et qu’il est question de boulotter illico le poisson qu’on va attraper, il n’est pas question de rentrer bredouille. En fait, il n’y a aucun risque, c’est un élevage de saumons qui propose cette activité, et malgré notre expérience pour le moins limitée en matière de pêche, on attrape rapidement trois beaux saumons (et un Petit Chat). Ils sont aussitôt fumés, et deux d’entre eux rapidement mangés, c’était délicieux (On n’a pas fait fumer Petit Chat (ce n’est pas de son âge) et on l’a encore moins dévoré, les enfants de l’école ne nous l’auraient pas pardonné).

Au retour, un crochet à l’est de Pohara où se trouve un monument (moche) à la mémoire d’Abel Tasman (Le premier navigateur à découvrir en 1642 la Tasmanie et la Nouvelle-Zélande) sur la Wainui Bay mais le temps est gris et la pluie arrive, il est temps de rentrer.

Pour la dernière soirée, on initie Dean et Petreah au Bush Rami, et on se prend une plumée, ils gagnent outrageusement ! La chance des débutants… Les meilleures choses ayant une fin, on les quitte le lendemain pour reprendre la route vers Nelson, à l’Est, sur une route agréable qui s’éloigne de la côte pour grimper sur de jolies collines où on doit parfois mettre pied à terre mais d’où le paysage est évidemment superbe.

A noter que coté végétation, par ici aussi c’est assez bluffant, bien qu’on soit en automne on trouve des fleurs magnifiques et des formes végétales dont on ignorait qu’elles puissent même exister.

Enfin du pain !!!

A Motueka, Un événement : Du pain, du vrai, qui croustille et sent bon, qui a du goût, pas comme les trucs carrés tout mous qu’on trouve partout. Vous ne savez pas la chance que vous avez, les Français, d’avoir du bon pain tout près de chez vous, chez le boulanger ! Et là on trouve aussi un truc plus local, sauf que c’est la première fois qu’on en mange des si bons : Des muffins au fromage bacon et tomates sèches, un régal, qu’est-ce que ça fait du bien. Dommage qu’on ne puisse en trimballer tout un stock, il faudrait qu’on pense à remorquer un congélateur à l’avenir.

On ne passe pas le bac

Ce n’est pas parce qu’on a passé l’âge, mais passer le bac à Mapua va s’avérer mission impossible. On n’avait pas prévu ça, mais nous sommes hors saison et il n’y a plus que le week-end que ce fichu bac fonctionne. Damned ! Komenkonvafaire ?
Qu’à cela ne tienne, on va traverser à la nage rester au camping du coin et on verra ensuite comment faire. En fait, c’est bien aussi comme plan, on se balade le long de la rivière, il n’y a pas un chat, c’est joli.

Et le lendemain on va se faire un sacré détour maousse costaud par la route à voitures bruyantes et fumantes pour finalement retrouver le petit circuit cyclable bien tranquille 15 km plus loin. Nous traversons une immense zone de marais avec des ponts  suspendus de temps à autre. Irène va trouver le moyen de se gameller sur l’un d’eux, jambe coincée sous le vélo qu’elle ne peut pas soulever. Tadammmmm, c’est qui qui va l’a tirer d’embarras ? Elle n’aime pas les ponts suspendus, elle a l’impression qu’elle va tomber à chaque pas, sauf que là c’est le vélo qui a fait des zig zag…elle devait stresser à mort !!!

On ne progresse pas bien vite observant les nombreux oiseaux qui ont élu domicile ici, ç’est un garde manger gigantesque pour eux. On stoppe à chaque panneau informatif sur les marais au temps des Maoris et on apprend ainsi qu’ils étaient maraichers bien avant l’arrivée des européens. Nelson au loin nous fait de l’oeil mais on est pas bien pressés de retrouver l’importante circulation que l’on distingue le long de la côte, cet endroit est trop paisible.

 

Nelson

Alors qu’on croyait arriver benoitement par la côte, voilatipas que Nelson étant dans une zone pleine de relief, il faut grimper pour y arriver et bêtement se retrouver au niveau de la mer une fois qu’on est dans le centre. L’avantage de l’inconvénient est que ça donne de jolis points de vue sur cette ville de 50 000 habitants. On s’en va résider dans un « palace » qui, s’il en porte le nom, n’en pratique fort heureusement pas les tarifs ; c’est une maison coloniale bleue accrochée à la colline, toute en bois et avec un mobilier d’époque, de hauts plafonds, un grand escalier, un régal de moquettes épaisses, de coins biscornus, de déco farfelue et évidemment de gens sympas. Et au Tea time il y a profusion de pâtisseries gratuites, que demande le peuple ?

Tiens, et si on se faisait un film ce soir ? Il y a un cinéma qui a le bon goût de passer un film français de Nicole Garcia « Le mal de pierre ». Très bien, on le recommande.

Coup de chance, nous sommes présents le jour du marché hebdomadaire et c’est un bien chouette marché où on ne trouve pas que des légumes, il y a surtout des artisans et artistes, ça ne manque pas de talents. On y passe un bon moment. Alors qu’on n’achète jamais de souvenirs (il faudrait les trimballer…) on craque pour une petite peinture de poule, trop mignonne.

Et on achète enfin la carte de l’Île du Nord, il est plus que temps d’y penser puisqu’on y sera dans quelques jours et qu’on n’a aucune idée de ce qu’on va trouver là bas. Pendant ce temps là, en France ce sont les élections présidentielles, on n’a pas non plus idée de ce que ça va donner là bas…

Puis nous quittons Nelson par bus pour Picton, le port où nous allons prendre un ferry pour nous rendre sur l’île Nord à Wellington. Et nous retrouvons notre chauffeur râleur qui nous a conduit de Greymouth à Wakefield. Ce matin il a 4 vélos à mettre en soute, il ne donne pas le coup de main néanmoins il va encore empocher les 20 dollars par vélo sans donner de reçu… « Les vélos c’est fait pour rouler «  râle t-il. Charmant bonhomme.
Peu importe, on se laisse porter par le confort du car et admirons le paysage, de temps en temps ça fait du bien de ne pas fournir d’effort pour traverser les cols.

Picton

Dernière  ville avant de larguer les amarres. On en profite pour publier l’article « 3 ans », visiter le port et ressentir déjà un peu de regret à l’idée de quitter demain cette île où on se sera tant plus et où il n’a pas tant plu.

Picton est une ville encaissée coincée entre les montagnes avec une ouverture sur la mer à travers les rias, ces anciennes vallées de rivières issues d’éruptions volcaniques creusées et remplies par les eaux du Pacifique. Les montagnes, boisées et abruptes, entourent un dédale de sounds (fjords) où le littoral est fait de baies et d’embouchures complexes. De petites iles sont devenues des sanctuaires pour les oiseaux.
Le Capitaine Cook a utilisé ces baies pour y trouver abri et nourriture. Ship Cove était sa base dans les années 1770. Il y a découvert une plante riche en vitamine C pour lutter contre le scorbut.

Le BBH où nous dormons ce soir est un endroit très cosy nommé Sequoia. Les hôtes offrent aux voyageurs, tous les soirs, la soupe maison et le fondant chaud au chololat avec glace à la vanille. Yummy ! Une jeune française qui est là depuis quelques jours n’en revient pas, elle se régale et on la comprend, nous aussi nous nous sommes régalés.

Nous allons traîner en ville du côté de la marina, immense, vous vous en doutez. Le Seamus, un pub écossais, nous attire et nous ne résistons pas à l’appel de la bière et une assiette de frites.
Nous apprenons que les écologistes de la région bataillent dur pour la conservation des
sounds. Une pêche intensive à la pétoncle racle les sols et endommage l’éco-système. Il y a beaucoup trop d’élevage de moules et de saumons.

Le ferry est à l’heure, cette fois nous aussi (pas comme en Tasmanie où on a failli le rater) et comme il part dans l’après-midi on peut profiter encore un peu des magnifiques paysages que nous laissons derrière nous :

Ce ferry va nous transporter en 3h30 à travers un paysage époustouflant. Nous prenons place confortablement au pont 3 dans un petit salon à l’avant du bateau, dédaignant les boutiques et restaurants des autres ponts. Nous sommes aux premières loges pour profiter de ce court mais fantastique voyage au pied des montagnes plongeant directement dans l’eau, impressionnant.

Nous rendons grâce devant tant de beauté naturelle et comprenons l’attachement du peuple Maori à ces lieux sacrés. Quel poids leurs mobilisations auront elles à long terme sur l’exploitation a outrance de ces lieux ? Qui l’emportera du sacro-saint business où chacun veut profiter autant que possible de la manne touristique de plus en plus nombreuse à venir visiter la nouvelle Zélande (touristes que nous sommes) aux groupes de défenseurs de la terre mère qui nourrira les générations futures ? Comme les aborigènes, les Maoris vénèrent la terre qui les porte et les nourrit, elle est une partie d’eux même au même titre que leurs ancêtres et leurs descendants.

Pendant ce temps là les vélos sont bien attachés en soute, ils n’attendent que de mettre les roues sur une nouvelle île, une nouvelle aventure commence.

 

SOUDAIN, alors  que la plupart des passagers sont en train de somnoler, des alarmes retentissent, vrillant les oreilles. Tout le monde se réveille, se demande ce qui se passe, ce qui justifie ce vacarme. Le personnel de bord a l’air inquiet, les gens commencent à se déplacer dans tous les sens, quand on voit arriver d’une coursive une épaisse fumée noire. Ça commence à être la panique, la foule se précipite sur les ponts extérieurs pour échapper à la fumée, mais il semble aussi que le bateau bouge de manière anormale alors que la mer est calme. Les éclairages s’éteignent tous, il ne reste plus que les sirènes qui hurlent, les gyrophares rouges qui flashent à tout va et le personnel qui ne maitrise plus rien, les gens qui crient, les enfants qui pleurent, c’est horrible. On n’est pas sur le Titanic, pas d’iceberg en vue, mais il parait  que s’il y a une voie d’eau au niveau d’une des portes d’un ferry il peut couler en quelques minutes ! On est en pleine mer et il fait nuit…

C’est à ce moment que tout bascule : La lumière revient, tout est calme à bord, c’était tout bêtement un cauchemar  !
Dommage, ça aurait fait un bon cliffhanger pour le prochain article, un suspense haletant, raté… Ce sera peut-être pour une autre fois.

 

6 Comments

  1. Les cochons bretons ont la queue en tire bouchon alors que les néo-zélandais non!! Si si ! Vérifiez! Les bretons sont stressés les pauvres!!!
    Allez bonne suite et bien contente que votre 🚢 vogue encore!

  2. D’île en île …ça fait rêver et j’ai bien cru « au cauchemar » mais je suis vite revenu à rêver la réalité!!hi
    A plus tard …merci les « Cyclobonheurs »

  3. Enfin visionné toutes les photos depuis un ordi digne de ce nom (les photos ne passent pas avec mon foutu smartphone), et là d’accord : le sound Charlotte sous le soleil ça a l’air splen-dide ; c’était assez gris le jour de ma traversée. Les vaches à rayures marron et blanc sont trop choux ; avez-vous pris en photo des vaches noires à tête blanche ? Bizz Ann Mary

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