Bon, maintenant fini de jouer ! On va attaquer les 300 km du grandissime-super-célèbre circuit Alps 2 Ocean Cycle Trail. Classé parmi les 16 plus beaux du monde, rien que ça.
Mais comme on ne fait rien comme tout le monde, on ne va pas aller des Alpes à l’Océan mais dans le sens inverse, celui qui monte tout le temps. Ce serait trop facile, sinon.
Première mondiale & record
Tadaaaa ! Ça n’a jamais été tenté avant, ce n’est pas du tout prévu pour ça, alors nous allons nous y attaquer : Parcourir le circuit, non avec des mountain bikes (VTT) légers, mais avec des chars d’assaut vélos couchés chargés comme des mulets. Et nous allons essayer, si on arrive au bout, de battre un record ; mais on ne vous dit pas encore lequel, comme ça si on échoue vous ne le saurez jamais.
Attention, cet article est long et comporte plein de photos : Pas moyen de faire autrement, les paysages sont tellement exceptionnels qu’on ne peut se résoudre à vous en cacher une partie ! Prenez votre temps pour la lecture, on en a pris bien plus pour l’écriture 🙂
Jour 1 : Kidnapping
Oamaru : Impossible de quitter tôt notre auberge ce matin, 2 jeunes chinoises nous ont mis le grappin dessus et nous abreuvent de questions et de « Oh, ah, nice, very good, fantastic, oh my God !!! ». Nous prenons enfin la route après de joyeux au revoir et rendez vous en Chine !
Passage obligé par le jardin botanique de la ville où la piste commence. Le fléchage est impeccable, l’environnement des plus bucoliques sous le soleil matinal.
Nous embrayons tronçons sur route et tronçons sur pistes en nous enfonçant doucement dans la campagne et vers les collines environnantes. Un passage un peu casse-goule le long d’une forêt nous oblige à mettre le pied à terre, ça sent le sapin !!! Mais non, on ne risque rien, c’est juste que les bucherons sont en train de s’activer à couper une bonne tranche de forêt et que l’odeur y est vraiment fort agréable. « ça sent les bonbons pour la gorge » s’exclame Irène !
On décide de s’arrêter casser la croûte à la faveur d’un bel endroit équipé d’une table avec banc, toilettes sèches et robinet pour remplir les bouteilles. Au milieu des collines ce genre d’équipent nous ravit toujours. Arrive une cycliste sur son vélo vert, elle roule léger. Nous la surnommons tout de suite Mado. En fait c’est Jeanette, elle se fait conduire pour ses étapes en camping-car par sa soeur qui la retrouve une cinquantaine de kilomètres plus loin ; elle est partie de Duntroon là où nous allons. En voilà une qui n’a peur de rien, visiblement elle adore son VTT. On pique-nique ensemble en discutant des beautés environnantes, des difficultés montantes et descendantes. Elle descend, nous moutons montons !
Le circuit serpente à flancs de collines, passe au dessus des ruisseaux, à travers les champs, traverse une ancienne voie de chemin de fer, passe sous un tunnel, ça n’est jamais ennuyeux ; même qu’on se retrouve près de la pâture de taureaux qui grognent bizarrement en regardant d’un air goguenard ces deux étranges cyclistes. Peut être qu’ils sont en train de se demander s’ils prennent des risques à nous charger !!! Ils ne ressemblent pas vraiment à des chatons, alors on se tire de là dare, dare… et on va arriver sur une portion de route entourée de falaises de calcaire, nous voilà arrivés en Anjou. Peut être y a t-il des grottes et des champignons ?
Tokarahi : Alors qu’on pousse les vélos dans un passage boueux, sous le regard indifférent des vaches qui paissent là, voilà qu’on rencontre Robert sur sa moto. C’est une moto de ferme, avec de la paille qui dépasse de partout, et pour cause, Robert est fermier et nous traversons ses terres. La conversation est tout de suite cordiale mais orientée car, nous ne le savons pas encore, Rob a très envie de nous héberger. Devant une telle offre, et la prédiction d’une pluie qui va arriver sous peu, on ne peut qu’accepter avec joie et on se retrouve bien vite dans la maison qui jouxte la ferme, où Yvonne est également fort accueillante.
En effet, la pluie arrive une heure plus tard et confirme qu’on n’aurait pas eu le temps d’aller au prochain camping. C’est toutefois un peu embarassant parce que les prévisions météo du lendemain sont très mauvaises, mais on est mis dans l’ambiance, on peut rester là aussi longtemps que nécessaire. L’hospitalité Kiwi, c’est quelque chose !
Jour 2 : A la ferme
Puisqu’il s’avère que le lendemain est une journée 100% pluvieuse, Robert pour qui c’est une journée Off se transforme en guide et va nous faire visiter sa ferme puis celle de François, un expatrié breton. Nous vous raconterons cette journée prochainement, car ça mérite un article à part.
La pluie n’empêche pas les moments chaleureux, on partage le risotto qu’on avait préparé, on fait des crêpes flambées, on joue avec le chat Roger, on est bien.
Jour 3 : Adieux et retrouvailles
Nous ne remercierons jamais assez Robert et Yvonne pour leur gentillesse extrême, ce fut une rencontre exceptionnelle jusqu’au dernier moment : La pluie ayant enfin cessé, même si la pelouse est complètement sooden (détrempée) ce matin, on on va quand même se risquer à les quitter par la piste qui doit être tout aussi sooden mais on se dit que sans les sacoches ça va faire puisque nos hôtes nous retrouvent ce soir au pub de Kurow avec tout notre matos.
On va peut-être continuer comme ça, avec un portage des bagages d'étape en étape et même tous nos repas au restaurant et les hébergements réservés à l'avance, comme la plupart des cyclistes qu'on croise. Non mais ça va pas la tête? Et l'imprévu alors ? Et les bivouacs dans des endroits improbables ? Et les galères pour transporter tout notre fourbi par routes et chemins bien pentus ? Et les pâtes au thon du soir ? En fait on ne va pas troquer notre liberté pour l'embourgoisement, même si on a maintenant un président-banquier-de-chez-Rotschild !
On va y retrouver également Marion et Freddy, le neveu et filleul d’Irène, qui sont en vadrouille eux aussi pour un mois au pays des Kiwis (Comme quoi il n’est pas difficile de nous voir, il suffit de nous rejoindre).
Et c’est parti pour 35 petits bornes. Nous enlevons vite fait nos chaussettes car on glisse facilement sur la gadoue et on a les pieds rapidement dégueu sales (on n’a qu’une paire de chausettes et on tient à les garder propres pour se réchauffer le soir à l’arrivée). En fait on ne roule pas si vite que nous l’avions prévu, la boue colle aux pneus et on est obligés de pousser, la honte, heureusement qu’il n’y a que les vaches à nous regarder…. Jusqu’à ce qu’on retrouve un bon vieux bitume pour les 25 bornes qu’il nous reste.
Nous traversons le petit hameau de Dutroon où se trouve le camping où nous aurions dû dormir avant d’être kidnappés par Robert.
La taverne est fermée, à vendre pour ceux que ça tente. Le musée de la géologie et des fossiles est fermé aussi, mais nous l’avions visité la veille avec notre guide Robert (c’est un féru de vieilles pierres). On admire les fresques sur les murs des toilettes publiques, Robert nous apprendra plus tard que c’est un de ses potes qui est le coupable.
Sur le bord de la route se dressent ça et là des petites croix en blanche en bois ornées d’une fleur de coquelicot. Elles sont placées sous de grands arbres et sont là en mémoire des soldats morts pendant la première guerre mondiale.
Kurow, petit village de 310 habitants, est célèbre grâce au capitaine des All Blacks : Rich Black McCall. Au début des années 20 elle a été la base de la construction du barrage voisin qui forme le lac Waitaki, le premier d’une série de projets hydroélectriques conséquents pour la région. C’est également ici qu’a été conçu le premier régime de sécurité sociale pour les travailleurs néo-zélandais. Le pinot noir y est bien présent aujourd’hui, il paraît que les sols calcaires lui sont favorables.
En tout cas c’est un petit bourg mais avec plusieurs commerces de bouche et une petite supérette, ce qui nous convient.
Nous retrouvons nos deux jeunes en face d’un des pubs, ca fait vachement plaisir de retrouver les membres de la famille ici si loin de notre chère Bretagne. On va passer une super soirée à échanger sur le thème du voyage et discuter de la vie néo zélandaise avec Yvonne et Robert qui nous ont rejoint pour un repas typiquement kiwi.
Puisque Fred et Marion voyagent en campervan (camping car), nous allons squatter leur véhicule pour la nuit. Et comme on est aussi radins malins qu’eux, on vote à l’unanimité pour s’installer sur un parking, ça économisera une nuit de camping.
Malgré l’exiguïté on dort bien dans ce machin là, et c’est toujours plus grand que la tente. On y passe une bonne soirée à jouer aux cartes et une bonne nuit.
Jour 4
Le lendemain Freddy cuisine un saumon frais qui leur a été offert par un pêcheur la veille (miam !) puis on se sépare : On va vers le Mt Cook d’où ils viennent (et qu’ils n’ont pas vu à cause de la pluie), ils vont dans le sens opposé en passant à la ferme apporter des Tim Tam à Robert et Yvonne. Vous ne connaissez pas les Tim Tam ? C’est une institution, ce truc là, il faudra qu’on vous explique ça avec des photos à l’appui un de ces quatre.
Maintenant qu’on se retrouve tous les deux seuls à Kurow, voilà que s’impose une invitée qu’on ne peut éviter : La pluie. Alors on reste, mais comme ce serait peut-être mal vu de planter la tente sur le parking, on file au camping du coin où on bénéfice d’une cabin (Bungalow) minuscule mais bienvenue.
C’est aussi l’occasion de débarrasser les vélos de leur gangue de boue, ce qui va les alléger de manière significative.
Jour 5 : Otematata, Yapukmontonton
Les couleurs d’automne sont épatantes, c’est vraiment une belle saison pour parcourir cette contrée. Jamais on n’a vu des peupliers d’un jaune aussi vif, même quand il n’y a pas de soleil ils illuminent le paysage.
C’est Pâques (oui on est en retard !) et les couleurs sont celles d’automne, c’est le grand bazar dans nos têtes, c’est génial, tout est à l’envers, on pédale dans un décor de rêve avec pratiquement pas de voitures. La montagne et pas mal pelée par ici, elle a des allures de grand mère intraitable… Faites gaffe, je vous ai à l’oeil ! On se concentre pour monter vers le barrage Benmore, et découvrir des tonnes de béton. Gigantesques réalisations hydroélectriques dans toute la région. On commence à comprendre pourquoi les villes se sont créées au fur et à mesure de l’avancement des travaux. il en a fallu de la main d’oeuvre pour réaliser de telles constructions dans un paysage aussi sauvage.
Un bref passage par Otematata, puis on continue vers le nord, vers le Mt Cook. Notons quand même que c’est ici que nous rencontrons Ida sur son Brompton (un vélo pliant avec des roues minuscules) en balade dans le coin avec une amie. Tout de suite elle nous donne son adresse à Aukland, si nous passons par là sa porte est ouverte. Encore une Kiwi qui offre spontanément le gite, notre carnet d’adresse s’enrichi !!!
Précision : Si Otematata est un drôle de nom mais bien réel, avouons que Yapukmontonton n’existe ni à proximité ni ailleurs dans le monde, hélas.
Jour 6 : Omarama
Le lac Belmore nous attend, mais il faudra d’abord monter pendant 7 kms une route partagée avec les voitures. Nous sommes en plein week-end et se sont les vacances scolaires, nous n’avons pas d’autre choix que cette route. Quand enfin on entame la descente vers le lac on a bien mouillé la chemise à tel point qu’il nous faut nous changer, le vent s’est levé et on commence à avoir froid.
Ici c’est le point de mise à l’eau des nombreux bateaux qui vont aller voguer sur le lac, nous sommes à Sailors Cutting et ça se bouscule au portillon si on peut dire. Les Néo Zélandais sont vraiment des fans de sports d’eau. On les regarde s’agiter tout en prenant la piste sur sa partie ouest et montons doucement vers Chain Hills, ouf on retrouve notre tranquillité, loin de la circulation (c’est qu’on devient exigeants !). Plus tard nous allons descendre dans une large vallée avec en ligne de mire la petite ville de Omarama.
L’Alps 2 Ocean est un circuit qui emprunte parfois des routes, d’autres fois des chemins dédiés et ce sont souvent les plus agréables. Un travail considérable a été réalisé pour créer ces itinéraires, comme quoi les Kiwis ont bien compris l’intérêt du cyclotourisme, eux.
Arrivée au camping, on aime bien l’agitation qui règne dans la camp kitchen ce soir, il y a plein de monde, chacun cuisine ses petits plats y’a plein d’odeurs délicieuses, ça discute dans toutes les langues, ça rigole, on fait cramer nos saucisses et on enfume tout le monde !!!
Omarama est comme ses copines, elle a été fondée autour des chantiers de barrages. Elle est devenue une ville de services pour tous les habitants et les fermiers des environs. Elle ne compte qu’environ 300 personnes à l’année mais elle voit son nombre d’habitants augmenter grâce aussi au tourisme. De nombreux logements se sont construits pour faire face à la demande constante des randonneurs, pêcheurs, astronomes, vélivoles, skieurs et autres cyclomigrateurs…..
Son nom Maori est « Endroit lumineux ». Ses cieux permettent de pratiquer le vol à voile, et son école a une réputation mondiale. On voit en effet pas mal de couleurs dans le ciel, il parait que les vents sont formidables ici.
Jour 7 : La bergerie providentielle
Le lendemain matin on saluera le gros mérinos qui trône à l’entrée (ou à la sortie, tout dépend de quel côté on y est entré !) de la ville. Les vrais, on les verra dans les prairies mais ils se sauvent quand on veut les prendre en photos. Ahuriri ahuris qu’ils sont de voir deux quidams qui en veulent à leur laine bien sur. Ahuriri, oui vous avez bien lu, c’est le nom de la rivière que nous traversons ce matin avant de nous en aller vers les montagnes. Elle est renommée pour la pêche à la mouche des truites arc en ciel et des truites brunes. On en connait qui seraient bien heureux ici avec leur canne à la main tiens ! Les eaux de Ahuriri ont coulé depuis 70 kms dans le bassin du Mackensie, elle s’en vont retrouver les eaux du lac Benmore où nous étions hier, puis celles du lac Waitaki et elles finissent leur course dans l’océan Pacifique, c’est donc un fleuve… Ah mais !!!
On va vite se retrouver sur une gravel road (route non asphaltée), la Quaiburn Rd, on laisse à notre gauche les « Clay Cliffs » de jolies falaises parait il, mais il faudrait faire un aller retour de 15 bornes sur une route qui elle n’est pas vraiment jolie et puis on a une belle montée à faire et on ne sait pas ce qui nous attend… 700 mètres de dénivelé ça n’est pas le bout du monde mais sur le gravier et les cailloux c’est un peu l’inconnu. Ça l’est tellement que Joël va se laisser surprendre et se rétamer dans les cailloux, pas de photo, Irène est arrivée trop tard.
On arrive vers 14h, à l’historic woolshed, une ancienne bergerie. Lieu de passage des cyclistes qui arrivent du lac Ohau, point de départ pour certains, d’arrivée pour d’autres, en plein milieu de nulle part entre montagne et vallée, un petit coin de paradis. On y est surpris de trouver là un camion-café.
Accueillis par des applaudissements de ceux qui sont en train de pic niquer, on fait de même au soleil dans cet endroit bien agréable. Neil, le type du camion-café, nous montre où on pourrait s’installer pour la nuit, à l’arrière de la bergerie.
Super idée, sitôt dit sitôt fait, on installe la tente là dedans. Ça surprend un peu les quelques visiteurs qui viennent par là, mais à partir de 17 h il n’y a plus personne, nous sommes seuls au monde dans notre bergerie providentielle.
En fait on n’est pas si seuls que ça, mais on ne le sait pas encore. Après un bon feu de camp qui nous réchauffe agréablement, on admire la voie lactée qui a l’air encore plus lumineuse que lorsque nous étions dans le désert en Australie. Magique !
Mais pendant la nuit on se rend compte qu’on a des voisins, bruyants qui plus est : Des opossums qui cavalent sur le toit en tôle ondulée, ça fait un boucan pas possible, et s’activent sur le sol autour de notre guitoune. Heureusement, ils ne trouvent rien à boulotter, sinon ils auraient peut-être fait des dégâts à nos sacoches.
Ça a l'air mignon, ces bestioles là, et d'ailleurs ça l'est, mais en Nouvelle Zélande c'est un fléau. Alors qu'ils sont tout à fait à leur place en Australie, les opossums ont été stupidement introduits ici pour leur fourrure et se sont multipliés comme des lapins (eux aussi stupidement introduits), mais comme ils n'ont pas de prédateurs ils profilèrent. Il y en aurait 70 millions ! Il dévorent tout, au détriment des espèces locales, et il n'y a pas moyen de s'en débarrasser. Le pire est qu'ils boulottent les oeufs des oiseaux, dont le kiwi, et ça s'est impardonnable dans ce pays.
Jour 8 : Le summum
Neil nous avait prévenus, faire la piste dans ce sens là, à partir de maintenant ça va être coton. Il avait raison, comme on va vite s’en rendre compte.
Déjà, au départ de notre bergerie on trouve bizarre de devoir revenir si loin sur nos pas puis bifurquer sur une piste qui n’a pas l’air utilisée, vu le manque de marques de pneus au sol. Mais le GPS et la carte sont formels, c’est bien par là. Sauf qu’il y a une rivière à traverser, elle n’est pas profonde mais nécessite quand même une séance de déshabillage, la traversée à deux pour le premier vélo, le retour, idem pour le second, puis rhabillage, quelle galère!
On comprendra plus loin le pourquoi de cette bizarrerie : La piste a été réaménagée, cette section n’est plus en service (ça on s’en doutait), elle arrive maintenant directement à la bergerie, ce qui est nettement plus court. Mais comme tout le monde fait le parcours dans le sens descendant, ils n’ont pas pensé à flécher pour les zigottos qui roulent dans le sens montant !
Ça grimpe pas mal sur un chemin caillouteux, pas extrêmement pentu mais à cause de notre charge nous devons souvent pousser. Ce qui n’est pas bien grave, le paysage est tellement superbe qu’on a tout le temps d’en profiter.
Nous sommes dans la région Mc Kenzie, qui comporte 22 montagnes de plus de 3 000 m. On ne les a pas comptées, mais les cyclistes qu’on croise sont aussi au nombre de 22. Bizarre, non ?
Enfin arrivés au point le plus élevé du parcours à Tarnbrae Highpoint (900 m), on se rend compte qu’on a mis trois heures pour parcourir sept kilomètres ! On a sûrement battu le record de lenteur sur cette section. Faut dire qu’avec les séances de strip-tease et les photos et vidéos, on n’avance pas des masses. On y rencontre David et Suzanne de Melbourne en mode léger et avec qui nous restons un moment papoter…nous avons le même âge !!!
Peu importe si on se traine, on a tout notre temps alors autant profiter de ces paysages majestueux maintenant car il est peu probable qu’on repasse un jour par là.
La descente va prendre moins de temps (heureusement) mais comme c’est tout aussi caillouteux que la montée, ça implique quelques acrobaties pour tenir l’équilibre et il arrive même que ça ne suffise pas. Mais comme d’habitude, en vélo couché on ne tombe pas de bien haut et il n’y a pas de bobo.
Ce magnifique parcours se termine au bord du lac Ohau, dans un lodge archi luxueux où nous ne dormirons pas pour cause de prix prohibitifs. Mais on va bien en profiter quand même, on s’offre un plateau de fromages, viandes froides, saumon, salade. Yum ! Les salons sont confortables avec vue sur le lac et le Mt Cook au loin, et la neige sur les Ben Ohau Ranges.
Au moment du dîner, quand tous les convives arrivent nous filons faire notre popote dans la tente. Ensuite de quoi on revient passer la fin de la soirée dans les fauteuils, il faut reconnaître que c’est plus confortable que la tente et ça change de notre bergerie de la nuit précédente.
Jour 9 : Eh oh Ohau !
Longer le lac Ohau, qu’on a si bien vu d’en haut, est un régal. La piste passe au plus près de l’eau, et à part les passages de chicanes un peu pénibles, c’est parfait. Ces fichues chicanes sont le prix à payer pour éviter que de stupides motards ne viennent saloper la piste qui est si belle et tranquille.
Devinez qui on rencontre une troisième fois au bord du lac, à Loch Cameron : Jeanette, un autre modèle de gazelle mal nourrie (alias Mado), la cycliste invétérée qui se régale aussi de ces parcours remarquables.
Au moment où l’itinéraire quitte les rives du lac, c’est pour franchir un barrage puis longer des canaux, ce qui est toujours aussi aquatique mais change pas mal le type de paysage : C’est droit, droit et puis droit, sauf quand ça tourne de quelques degrés pour redevenir droit.
Ça pourrait devenir monotone mais en fait non, car il y a de quoi voir en route, notamment les fermes à saumons auprès desquelles des pêcheurs essaient de récupérer ceux qui se sont échappés. C’est là que Freddy et Marion ont été gâtés par un pêcheur qui leur a donné un saumon, celui que nous avons boulotté ensemble à Kurow.
C’est ainsi que nous arrivons à Twizel, où nous filons au camping du coin.
Jour 10 : Le sommet
De Twizel au Mont Cook (Aoraki), l’Alps 2 Ocean Cycle Trail emprunte un parcours assez particulier puisqu’il comporte un passage en hélicoptère au bout du lac Pukaki. Comme le trajet ne dure que 5 mn mais coûte $ 800 (600 €), à partager entre les passagers mais avec notre fourbi on remplirait sans doute l’hélico, n’ayant pas fait carrière chez Rothschild on ne va pas retenir cette option délirante.
C’est de Twizel que nous partons le lendemain matin de bonne heure. C’est un jour off, pas de vélo. On opte pour une navette qui va nous emmener voir de plus près le fameux glacier Tasman.
On laisse les vélos avec tout le bazar sur la place centrale de Twizel devant le visiter center et c’est parti pour aller voir ce fameux Mont Cook qui culmine à 3724 m, c’est le massif le plus haut de l’île sud et de la N.Z.
En véhicule motorisé on ne le regrette pas car la route est rectiligne sur plus de 50 km. Le seul point d’intérêt est le lac Pukaki, immense (8km de large sur 27 km de long) alimenté par la rivière Tasman qui descend du glacier du même nom. Le mont Aoraki-Cook se dessine majestueux et imposant au fur et à mesure de notre progression.
Nous arrivons devant un grand complexe hôtelier « The Hermitage » avec bars et restaurants, boutiques, visitor centre, musée, le tout posé au pied de la montagne mais suffisamment éloigné des couloirs avalanches et des piemonts de la rivière. Ce « village » domine la vallée qui mène au départ des randonnées vers le glacier Tasman. Même s’il a été déplacé, cet endroit était à l’origine un camp de base pour les alpinistes et les randonneurs. Tout le reste du village n’est qu’appartements ou chambres d’hôtel pour les nombreux touristes qui transitent ici. Une épicerie hyper chère, il vaut mieux faire ses provisions à Twizel avant de venir séjourner ici.
Aoraki
Bien longtemps avant d’être baptisé Mont Cook en 1851 par le capitaine Stokes en l’hommage au capitaine Cook, le sommet le plus haut de la Nouvelle-Zélande fut nommé Aoraki « nuage dans le ciel », ou « perceur de nuages » par les Ngai Tahu.
« Les Ngāi Tahu, la principale tribu du Sud de la Nouvelle-Zélande, considèrent l’Aoraki comme l’ancêtre le plus sacré desquels ils descendent. L’Aoraki soude la communauté, il demeure sa forme physique et constitue le lien entre le surnaturel et la nature ».
Un mythe explique comment cette montagne fut d’abord un homme :
"Lorsque que Raki (le ciel) se maria à Papa (la terre), chacun d’eux avaient déjà eu des enfants de précédentes unions. Quatre fils de Raki descendirent du ciel pour rencontrer sa nouvelle femme et faire connaissance avec les enfants de celle-ci. Ainsi, Aoraki et ses jeunes frères Rakiroa, Rakirua, Rarakiroa arrivèrent dans un immense Waka connu sous le nom de Te Waka-a-Aoraki (la pirogue d’Aoraki) Les enfants naviguèrent alors sur les eaux de la création mais cherchant une terre où se reposer, ils ne trouvèrent que l’océan. Ils tentèrent donc de retourner au ciel, mais un désastre les emporta car leur chant rituel n’avait pas été récité correctement. Leur navire commença à couler. C’est alors qu’ils furent pétrifiés par le vent glacé. La coque se transformant en pierre devint l’île du Sud, et les passagers qui s’étaient hissés dessus devinrent les montagnes. Aoraki, le plus vieux des quatre frères est le plus grand pic, et les autres s’érigent aux alentours. Le nom anglais de Rakiroa est Mount Dampier, celui de Rakirua est Mount Teichelmann, et celui de Rarakiroa : Silberhorn."
Le Visitor Centre est impressionnant : Ce magnifique bâtiment abrite des expositions qui pourraient occuper des heures, on découvre comment des générations d’alpinistes sont venues grimper ici, dont la première femme à vaincre le sommet : Fredda Emmeline Du Faur en 1910 qui portait jupons car à l’époque il n’était pas question qu’elle porte la culotte. Elle est arrivée la haut avec ses deux guides Peter et Alec Graham. Une salle est consacrée aux nombreuses victimes (près de 200), y compris récemment. On y découvre l’histoire de leurs vies, les conditions d’ascension et celle de leur mort. Souvent des jeunes gens de moins de 30 ans, impétueux et téméraires qui bien souvent n’étaient pas équipés comme les grimpeurs d’aujourd’hui.
De nombreux alpinistes du monde entier ont fait la course pour vaincre Mont Cook, mais ce sont tout de même 3 Kiwis qui ont réussi à arriver au sommet le 25 décembre 1894 : Fyfe, Graham et Clark.
Nous allons faire une randonnée de 4 heures qui nous mène à Hooker valley face au mont qui se cache dans les nuages, tout en longeant la rivière du même nom, la traversons à 3 reprises sur des ponts suspendus en bois, Irène n’apprécie pas trop ces ponts qui bougent sous les pieds, surtout que la rivière en bas charie cailloux et roches dans ses eaux grises. Le parcours pour aller au pied du glacier est magnifique et agréable, il permet une approche progressive au long de laquelle les points de vue sont de plus en plus épatants.
A partir de là on passe en « mode Panorama » pour tenter de vous donner un aperçu de ce qu’on a autour de nous :
Pas mal, non ?
La chaîne du glacier se dessine superbe et extraordinaire, le sommet nous apparaît enfin au terme de la rando, les nuages s’écartant telle une récompense pour être venus l’admirer de plus près. Le lac un peu en contrebas recueille quelques débris de glacons géants plutôt gris qui ne dénotent pas avec la couleur de l’eau.
Un endroit idyllique pour pique niquer, les appareils photos et les selfies sont nombreux de la part des visiteurs asiatiques en grand nombre.
On s’imprime de la magie du lieu, tout est tellement plus beau sous le soleil.
La redescende est sympa aussi, en traversant la rivière qui charrie les eaux glaciaires avec leur couleur si caractéristique due à la « farine de pierre » créant un sédiment provenant des glaciers au cours des siècles, d’où cette teinte laiteuse qui devient turquoise sous les rayons du soleil.
Pour le retour, on décline la gentille offre d’un couple de Grenoble qui propose de nous remmener à Twizel, car on a réservé notre mini bus et on ne voudrait pas que le chauffeur nous attende en vain. Eh bien on a eu tort, on aurait dû accepter : Le chauffeur est parti sans nous alors qu’on attendait l’intérieur de l’hôtel, il aura fallu plusieurs appels à la compagnie pour qu’ils décident finalement de nous envoyer un autre chauffeur, mais le temps qu’il arrive le soleil est bien bas. L’avantage de l’inconvénient est qu’on bénéficie de magnifiques vues crépusculaires sur le lac :
Trop tard pour notre projet d’aller dormir comme prévu au bord du lac, mais notre chauffeur Leggie est super sympa et nous propose de camper dans la cour de son B&B et de profiter de la douche, cuisine et salon, tout ceci gratuitement. Au petit matin, la tente est givrée, c’est la première fois.
Jour 11 : The end
Cette section du parcours A2O est qualifiée d’optionnelle, elle permet de rejoindre le lac Tekapo, il n’y a pas besoin d’hélico alors nous optons pour l’option.
Après 10 km de route ennuyeuse on atteint le sud du lac Pukaki par une jolie piste, à l’endroit où on aurait dormi si on n’avait pas été retardés la veille au soir. Le mont Aoraki-Cook est au loin en ligne de mire toujours aussi superbe.
Nous discutons avec un couple turc (la situation dans leur pays les afflige), une femme de Cognac (mais elle ne nous offre pas de cognac) puis un groupe de cyclistes de location avec leur guide….donc on n’avance pas bien vite et on bavasse beaucoup, ça on adore aussi.
Après une côte qui nous fait bien suer en quittant le lac pour monter au barrage qui le surplombe, on suit le canal. Le parcours est moyennement drôle : Parfois c’est une route bien goudronnée, souvent c’est du gros gravier et c’est pénible, aussi finirons-nous par rejoindre la « route à voitures », ce n’est pas agréable mais au moins on avance.
Ce soir c’est l’arrivée à Lake Tekapo, on a une belle vue sur le lac éponyme, baigné dans les couleurs de fin d’après-midi. Le camping est énorme, il a le monopole dans le coin, il est interdit de camper partout ailleurs. En arrivant, surprise, on entend une voie crier « Irène !!! » ; C’est Kris, l’Écossaise rencontrée à Albany (Australie) il y a quatre mois. On fait aussi connaissance avec les Auvergnats Benjamin et Nicole en congé parental ainsi que Corinne, originaire de la Drome. C’est un plaisir de rencontrer ces voyageurs de tous âges.
"Le voyage est fatal aux préjugés, à l'intolérance et à l'étroitesse d'esprit, et beaucoup de nos gens en ont besoin avec force sur ces comptes. Les vues larges, saines et charitables des hommes et les choses ne peuvent être acquises en végétant dans un petit coin de la terre toute la vie." Mark Twain (1869)
Tekapo est, comme sa voisine Twizel, une ville qui a été créée dans les années 30 à l’occasion des immenses travaux hydro-électriques (barrages, canaux et centrales). Si elle compte moins de 400 habitants permanents, elle est cependant très animée car le lac attire de nombreux touristes (dont nous). Comme il parait que c’est l’endroit le moins peuplé de Nouvelle Zélande, il n’y pas de pollution lumineuse, d’où un observatoire réputé sur le Mt John.
Outre le lac, ce qui fait venir du monde est l’église du Bon Berger, qui date de 1935. Une particularité est que derrière l’autel on a une vue magnifique sur le lac, ça donne une impression de luminosité et d’ouverture intéressante. A l’extérieur un homme entretient les végétaux, c’est David Scott, qui offre à Irène (qui photographiait des fleurs) des graines de Connie Lupins qui viennent de sa grand-mère (mais on n’a pas bien compris l’histoire, il a un accent à couper au couteau).
Et voilà, nous allons quitter Tekapo à contre coeur, on aimerait y rester encore pour pouvoir randonner aux alentours et observer les étoiles….on y reviendra……
Record battu !
Oui, nous avons réussi, le record mondial est pulvérisé :
*** Les Cyclomigrateurs sont titulaires du record de lenteur sur l’Alps 2 Ocean Cycle Trail ! ***
11 jours là où les organisateurs le donnent pour 8 jours maximum avec l’aide de l’hélico, c’est un exploit. Et ceci dans le « mauvais » sens (celui qui monte) et avec des « mauvais » vélos (ceux où on n’a pas mal au c*l). Un record à battre, assurément.
Quel récit palpitant, que de rencontres, et encore des paysages merveilleux ! d’autant plus passionnant à lire pour moi qui vient juste de traverser ces mêmes contrées, sur un rythme beaucoup plus rapide en van. Bravo à tous les deux pour votre record mondial !
Félicitation pour ce magnifique record !
Comme à chaque fois, 1001 MERCIS !
Pour ce voyage époustouflant en canapé (vu de mon côté),
Pour les vues panoramiques de rêves,
Pour vos sourires respectifs
…
Tendresses
Nanou
coucou les vedettes cyclo ………
J’ai tout bien lu ……………jusqu’au bout ………..lollllll
J’ai revu les photos que ma fille a fait le mont cook entre autre …..des endroits ou elle a passée , dormie aussi dans son van en plein hiver tout gelé a l’interieur ……….
Vous etes des vrais aventuriers …
C’est fou aussi le nombreux de français que vous croisez ,la nouvelle-Zélande est bien visitée pourtant loin de chez nous ……….
J’adore vous lire et j’attends avec impatience la suiteeeeeee
Bisous Lili
Bonjour Bonsoir
Effectivement je me faisais la réflexion qu niveau du record mondial des RENCONTRES ..extraordinaire!!Merci pour route à découvrir .à vélo…Bye bye Quénavo .
Génial, bravo, et merci de le partager si magnifiquement par ces images et excellents récits: On est avec vous!
Bonne continuation!
super beau recit belles photos magnifiques bizouilessss
Que de souvenirs, nous (Les P’Tits Vélos Dans la Tete) étions passés « dans le bon sens » et avions aussi adoré cette fabuleuse piste A2O. Nous avions adoré le bivouac auprès de la bergerie, mais nous n’avions pas eu droit à la voiture « café ». Vous avez dût bien galéré pour la montée que nous avions descendu en mode VTT.
Profitez, ça donne juste envie d’y retourner en version « Light » ….
Chaque fois c’est un plaisir de vous lire.Continuez de me faire rêver.
Coucou, je suis là, Mamie Nicole ! Malgré mon silence je vous suis et continue de voyager avec vous : mais je suis en déménagement et réaménagement puisque ma maison est en vente et j’ai trouvé une location dans un appartement tout neuf : alors je « cartonne »…
Bonne route, bises amicales. de Mamie Nicole.
Comme toujours très beau récit et magnifiques photos! Félicitations pour votre record! Continuez à nous épater. Vous en voyez de belles choses! Bises
Quel régal ce reportage! Et bravo pour les photos aussi! C’est marrant de revoir tous ces endroits sous un autre point de vue! Tekapo restera notre plus beau souvenir. Nous avons eu la chance de faire une virée dans la nuit profonde à l’observatoire pour observer le ciel …éblouissant!. On reviendra si on le peut! Bonne route et vivement la suite! Corinne
Bravo pour les efforts consentis mais qui valent le détour compte-tenu des photos extraordinaires.
Bonne continuation. Biz Philippe
Bel exploit bravo et tout l’intérêt d’avoir tout son temps pour avancer à sa guise . vous avec tout compris
« la liberté «
grandiose