On déboule à Istambul

Une semaine à Istambul, c’est une expérience inoubliable. Certains n’aiment pas, nous si ! Il ne faut certes pas y venir pour trouver le calme et le repos, par contre si on aime la découverte on a de quoi faire.

Bienvenue à Instambul
Bienvenue à Instambul

On s’en doutait et on le redoutait, rouler à vélo à Istambul est une expérience très particulière. Comme on débarque vers 21 h, on imagine naïvement que la circulation sera moindre qu’en journée, mais que nenni : c’est peut-être même pire parce que s’il y a un peu moins de voitures elles roulent plus vite. Nous alternons entre de grands axes sur lesquels la circulation est intense (le pire sont les bretelles de sortie et d’entrée, car à ces moments là nous sommes noyés dans le flot de la circulation, ça déboule de partout) et de petites rues dans lesquelles il faut se faufiler, et surtout où les pentes sont balaises. C’est assez stressant comme truc, l’adrénaline coule à flots et ça provoque quelques énervements. Pour tout arranger, le GPS nous envoie dans des passages impossibles, on se retrouve à prendre des sens interdits et des trottoirs. A un moment, après une belle descente, la rue prend une pente inverse et on a l’impression de se retrouver face à un mur : ça grimpe tellement qu’il est presque impossible de pousser les vélos, ils ne demandent qu’à reculer ; et on ne peut pousser à deux car il faudrait laisser un vélo tout seul pendant ce temps, ça ne semble pas prudent. Heureusement, de jeunes africains vont venir à notre secours et pousser avec nous les 300 m de montée, c’était très sympa, merci les gars.

Néanmoins, nous arrivons vers 22h30 pile poil devant chez Ilke, notre hôte. Soulagement suivi d’une mauvaise surprise, il faut faire grimper les vélos au 3° étage par l’escalier… Mais une fois de plus la chance va nous sourire, la voisine cubaine du rez-de chaussée montre le nez à sa fenêtre et propose de stocker les vélos chez elle. Outre la commodité, c’est aussi une bonne opération de communication puisqu’elle fait la connaissance d’Ilke qu’elle n’avait jamais vu, alors qu’il habite là depuis quatre ans…

Mais comment sommes nous arrivés chez Ilke, vous demanderez-vous peut-être ? Grâce à David et Marie qui ont été hébergés par Engin, lequel ne pouvait nous recevoir mais a demandé à son beau-frère qui habite juste en face, dans l’ancien appartement de Hande, soeur de Ilke et épouse d’Engin (ça va, vous suivez ?).

Toujours est-il que nous allons rester une semaine chez ce charmant garçon qui nous prête sa chambre et se montre extrêmement obligeant ; nous avons bien essayé de trouver un autre hébergement au bout de trois jours, mais en vain, alors nous sommes restés mais Ilke n’a pas semblé s’en plaindre, et il a apprécié les crêpes et la mousse au chocolat cuisinées par Irène. Pour les galettes bretonnes, il devra venir nous voir à la maison, car même au bazar on n’a pas vu de farine de sarrasin.

Un sacré bazar

Cette métropole est incroyable, ça bouge tout le temps, il y a du monde partout et ça se passe bien. La circulation est dense mais ça a l’air de bien avancer tout de même, les rues peuvent être noires de monde sans qu’on aie à jouer des coudes, et il y a tellement de commerces que ça donne le tournis. Rien que dans le Grand Bazar, il y a près de 4 000 boutiques qui font travailler 30 000 personnes. C’est la caverne l’Ali Baba puissance 10, ça brille, c’est coloré et parfumé, on s’y perd avec plaisir. Tiens, on est déjà passés par là ? Ben oui, mais on n’a pas de plan alors on parcourt au pif, souvent interpellés par les marchands, mais sans insistance et avec le sourire. Et ce n’est pas tout, les rues environnantes sont également d’immenses galeries marchandes à ciel ouvert, avec des secteurs thématiques. Par exemple, le coin des boutons en métal, celui des foulards, celui des nappes et linge de maison, celui des vêtements pour enfants, etc.

Par contre, si on cherche quelque chose de précis, c’est loin d’être évident, il faut connaître. Beaucoup de boutiques vendent peu ou prou la même chose, surtout les vêtements et les gadgets. On se demande comment certaines échoppes peuvent vivre, tellement elles sont petites et peu fréquentées par la foule qui s’agglutine surtout dans les plus grandes allées.

A l’extérieur, il est intéressant d’observer le manège des livreurs qui approvisionnent tout ce bazar, d’autant que nombre d’entrepôts se dissimulent derrière des façades et des portes tout à fait banales. La marchandise est acheminée à dos d’hommes dans un ballet qui pourrait tenir d’une chorégraphie mystérieuse tellement les colis se déplacent avec fluidité.

C’est un travail difficile qui doit user ces hommes de bonne heure, les pentes sont rudes entre les camions de déchargement et les sous-sols des boutiques où sont déposés les balots de vêtements, pourtant ce sont aussi des hommes d’un certain âge qui sont à l’oeuvre. Certains tirent également des chariots où la marchandise tient en équilibre précaire ; la solidarité semble de mise, pas besoin de demander le coup de main pour être poussé.

On est vieux ?

Expérience vécue à deux reprises, et qui nous a marquée : Dans le tramway puis dans le métro, alors qu’il y avait beaucoup de monde (mais où n’y a t’il pas beaucoup de monde à Istambul ?), des jeunes hommes assis se sont levés pour nous laisser leur place. Ça donne un coup de vieux, d’un seul coup !
Nous avons poliment refusé, on est venus en vélos, on peut bien tenir debout encore un peu…

Transports en commun

Cette ville est d’un dynamisme incroyable, on a l’impression que tout va vite, alors qu’en France il faut des années pour faire avancer le moindre projet. Par exemple, le réseau de métro et tram ne compte « que » 130 km de lignes, mais dans les 5 ans à venir il est prévu de passer à 700 km ! A comparer aux 25 ans pour avoir deux petites lignes à Rennes…
Du fait de cette progression fulgurante, les équipements sont récents et modernes (les trams Alstom sont français, les métros Hyundai sont coréens), les stations vastes et belles, avec peu de publicité (pas comme à la RATP) et les prix très raisonnables.
Par contre, les stations étant très espacées, il faut parfois marcher fort longtemps pour en rejoindre une.

Quant aux bus, comme dans toutes les grandes villes, on n’y comprend rien : Il y en a dans tous les sens, les numéros de ligne sont à rallonge et les destinations sont écrites à l’avant mais on n’a pas le temps de tout lire que le bus est déjà parti !

C’est Bysance !

Nommée Bysance, puis Constantinople et enfin Istambul depuis 1930, cette ville recèle des trésors architecturaux et des trésors tout court. Nous nous intéresserons surtout à ceux du quartier historique, sur la rive européenne, il faudrait bien plus d’une semaine pour tout découvrir.
Les mosquées, tout d’abord, nous attirent. Il y en a plus de 3 000 mais on va se contenter des plus célèbres, il faut être raisonnables.

Au fil de nos pérégrinations nous visiterons donc la mosquée de Soliman le Magnifique, la mosquée Bleue, la mosquée des Princes et, pour changer de culte, la basilique Sainte Sophie. Ce ne sont pas les superlatifs qui manqueraient pour décrire ces lieux qui, outre leur taille impressionnante, sont d’un raffinement sans égal. Outre les prouesses architecturales, les artistes qui ont réalisé les fresques, émaux et caligraphies ont rivalisé de finesse et de sobriété.

Bien sûr nous avons en Europe des cathédrales impressionnantes, mais l’ambiance y est généralement froide alors que ces mosquées sont des lieux où on se sent bien, peut-être les épais tapis et la clarté y contribuent-ils. Nous avons d’ailleurs « profité » d’une grosse averse pour prolonger notre séjour dans la mosquée des Princes et ainsi assister à la prière, c’est un peu surprenant quand on ne connaît pas le culte : Les hommes sont alignés épaule contre épaule en une longue ligne face à la Mecque, les retardataires courent pour essayer de se trouver une place puis finalement démarrent une nouvelle ligne. Un quart d’heure plus tard, la prière est terminée, certains partent, dautres restent plus longtemps.

Recueillement
Recueillement
Incroyable aussi, le palais de Topkapi est une merveille construite entre 1460 et 1478 par le sultan Mehmed 2. C’était la résidence officielle des sultans jusqu’au XIX siècle.
En fait, c’est un ensemble de constructions dominant le Bosphore et la Corne d’Or. Les cuisines, immenses, pouvaient nourrir jusqu’à 3 000 invités et la vaisselle utilisée est sublime, provenant de nombreux endroits du monde, souvent cadeaux des autres pays. Une suite de cours se succède, chacune ayant un rôle bien particulier, les dernières étant réservées au sultan et les plus hauts dignitaires.
Un pavillon est consacré à l’exposition des armes, souvent serties de pierres précieuses pour estourbir l’ennemi en beauté (mais, comme disait le regretté Desproges « L’ennemi est bête : il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui »). Le pavillon des curiosités renferme des trésors d’une valeur inestimable, par exemple quand un jeune prince venait au monde on lui fabriquait trois berceaux en bois recouverts d’or et de pierres précieuses ; le « diamant du marchand de cuillers », qui aurait été trouvé dans une décharge et troqué contre des cuillères, fait 80 carats (lld marchand a bien joué sur ce coup là…).
La quatrième cour est l’une des plus belles parties du palais, avec notamment la salle des circoncisions où on peut admirer les plus beaux panneaux de faïence du sérail. Bref, on se régale tellement c’est beau, il faudrait plus de temps pour tout visiter.
Il est 18 heures, on meurt de faim car on a oublié de déjeuner avant d’entrer dans le palais, et le restaurant local est hors de prix. Plus le temps de visiter le harem, qui est parait-il aussi un endroit incroyable (mais il n’est plus en fonction, tout fout le camp ma pôv dame).

Histoires d’eau

 Autre édifice très curieux, la citerne basilique (Yerebatan Sarnici). Comme les palais impériaux avait de grands besoins d’eau en été, il fallait la stocker en hiver et les architectes ne se sont pas contentés de construire un bête réservoir. Datant tout de même du IV siècle, l’édifice souterrain comporte 336 colonnes toutes différentes, c’est impressionnant. Le prix de la visite est toutefois exagéré, celle-ci étant relativement courte.

Comme le temps est toujours à la pluie, on se réfugie dans le très joli café Kybeleb rue Yerebatan, l’entrée ne paie pas de mine mais l’intérieur est très cosy. Une bonne adresse à retenir.

Misère

Tout n’est pas que magnificence dans cette ville, il y a la vie des quartiers, les petits boulots, mais aussi la mendicité. Ce sont des femmes, souvent avec de jeunes enfants aux pieds nus, qui tendent la main. Quand les enfants sont un peu plus grands, ils sont toujours pieds nus et quémandent par eux-mêmes. Bien qu’ils soient correctement habillés, c’est toujours une gêne de voir le sort de ces enfants, quel avenir les attend il ?

Chats alors !

C’est incroyable le nombre de chats dans cette ville, ils ont l’air heureux comme tout. Il faut dire qu’ils sont bien nourris, on voit des gamelles de croquettes partout, ce sont semble t-il des « chats publics », ce qui ne doit pas faire l’affaire des souris.

le bonheur
le bonheur

Allaha Ismarladic Istambul

Quitter la ville à vélo n’est pas plus facile qu’y entrer, comme on peut s’en douter, mais cette fois-ci nous roulons de jour et c’est quand même moins stressant. On retrouve les pentes pas possibles, notamment une où ça descend tellement que, même les roues bloquées, le vélo avance tout seul. Avec nos chaussures à cales, on glisse aussi, c’est plutôt inconfortable comme situation. Irène, qui a eu la mauvaise idée de descendre de sa monture lors d’un demi tour, a hésité à l’enfourcher pour la descente, tellement celle ci était impressionnante, du coup elle se retrouve en train de glisser sur ses cales en ne freinant que d’une roue évidemment, elle pousse des cris désespérés et une dame vient à son secours en retenant le vélo à l’avant. Pendant ce temps là un taxi prend patience derrière elle, il a la délicatesse de ne pas klaxonner, heureusement parce qu’il est certain qu’elle lui réservait un bel échantillon de mots colorés, un peu énervée quand même. Joël remonte la pente comme il peut sans retirer ses sandales et c’est à deux, freinant chacun de son côté, qu’on arrive jusqu’en bas !
Certains diront qu’on râle tout le temps, quand ça monte trop, quand ça descend trop : Pas faux, mais on voudrait bien vous y voir, tiens.

Le plus fort est quand, après avoir essayé de nous faire traverser une rocade par une passerelle à piétons bardée d’escaliers, le GPS veut nous faire traverser un fleuve par un pont qui n’existe plus ! Nous décidons alors de suivre les panneaux routiers vers la gare routière, là au moins c’est fiable, mais ça rallonge considérablement le trajet en passant pas des autoroutes à 2 x 5 voies, c’est fou comme on aime rouler là dessus. Ca fait un peu comme si on pedalait sur le périph’ parisien mais pas aux heures de pointe quand ça bouchonne, ce serait trop facile, plutôt quand la circulation est dense mais rapide. Pendant ce temps là, on connait deux bretons qui roulent dans les montagnes vers le nord, c’est autrement plus tranquille.

La compagnie de bus qu'elle est bien
La compagnie de bus qu’elle est bien

Finalement, nous arriverons à la gare routière avec plus de deux heures d’avance, on avait prévu large. Nous nous étions préparés à batailler ferme pour faire embarquer nos vélos sans payer de supplément, et ça a été inutile, personne ne nous a rien demandé et le type qui nous a aidé a même refusé le pourboire.
Nous voici en partance pour la Cappadoce, au centre du pays, ça va être bien différent de cette semaine stambouliote. Mais d’ici là il y a douze heures de route, la nuit promet d’être longue.

7 Comments

  1. Moi aussi j’adore Istambul!! Quelques jours dans cette ville et on comprend que la France appartient au « vieux continent »… Bonne continuation les petits amis, toujours avec le meme sourire! Isabelle

  2. vous venez de me faire revivre des moments inoubliables passés (y a qq années !!) à ISTAMBUL , maintenant j’attends votre avis sur le paysage de la Cappadoce extraordinaire- vous allez pouvoir apprécier l’eau chaude pour un bain pour vos petons et faire une prière dans une chapelle pour vous faire pardonner de vos jouissances dans ce pays où malgré tout la pauvreté y règne. mais bon on n’y peut rien, profitez d’engranger le + possible dans votre mémoire pour vos vieux jours et sur votre PC pour notre ravissement. Merci – Restez en bonne forme . Bises.

  3. Vous voilà en Asie et le voyage semble couler comme prévu , c’est cool d’ailleurs on vous souhaite de bons kilometres à venir pour la suite vers l’Est

    La bise de Landerneau
    SCTM

  4. tout simplement magnifique et un grand merci a vous de nous faire voyager ainsi a travers votre blog gros bisous prenez soins de vous et bonne continuation

    claude,lydia & mathys

  5. si vous passez à Urgùp cherchez la maison Raziya Evi. La personne qui tient cela est Lausannoise d’origine et super sympa elle se nomme Romy . Chez elle y a Hamman et sauna privé… que du bonheur. Bonne route à vous et merci pour les souvenirs Stambouliotes…

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